Site clair (Changer
 
    Fiche livre     Connexion adhérent
Nouvelles de la mère patrie

Dmitry GLUKHOVSKY

Titre original : РАССКАЗЫ О РОДИНЕ, 2010
Première parution : www.nibbe-wielding.com (site web), 2010   ISFDB
Traduction de Denis E. SAVINE & Julia VANIDZE
Illustration de LERAF

L'ATALANTE (Nantes, France), coll. La Dentelle du Cygne précédent dans la collection suivant dans la collection
Dépôt légal : février 2018, Achevé d'imprimer : février 2018
Première édition
Recueil de nouvelles, 256 pages, catégorie / prix : 3
ISBN : 978-2-84172-845-9
Format : 14,5 x 20,0 cm
Genre : Imaginaire


Quatrième de couverture

Nouvelles de la mère patrie est un recueil de textes écrits à l’origine pour la presse russe, car, avant même d’être romancier, Dmitry Glukhovsky est journaliste. Et rien ni personne n’échappe à sa plume acerbe, à commencer, bien sûr, par le numéro 1 (qui échange parfois sa place avec le numéro 2) – le Leader de la Nation –, suivi de près par les strates corrompues de l’administration, les mafieux reconvertis en hommes d’affaires, les nouveaux riches, les gens modestes, les travailleurs immigrés, les flics intègres, les journalistes, la télévision, l’alcoolisme omniprésent, les extraterrestres, le diable et ses hordes de démons, et les habitants oubliés des steppes sibériennes. Chacun reçoit son dû, qui pour ses vices, qui pour sa complaisance, qui pour sa naïveté et son incapacité à ouvrir les yeux sur le monde qui l’entoure.
L’absurde et le fantastique, qui jalonnent le quotidien russe, ne sont jamais loin, et l’on se surprend même parfois à ressentir de la tendresse pour certains protagonistes.

     Pour un lecteur occidental, la fenêtre que Dmitry Glukhovsky ouvre sur le quotidien des gens du peuple comme sur celui des affidés du pouvoir peut sembler un miroir déformant, tant on a l’impression que l’auteur prend le pas sur le journaliste pour forcer le trait sur la naïveté des uns et les compromissions des autres. Malheureusement, la fiction n’est pas très loin de la réalité.

     C’est la génération la plus intéressante. Ses représentants ne sont ni soviétiques, ni antisoviétiques, ni postmodernes, mais écrivains tout court. Dmitry Glukhovsky, écrivain polyglotte de 38 ans, fait partie de cette génération décomplexée.
L’Express
, Marianne Payot

Sommaire
Afficher les différentes éditions des textes
1 - From Hell, pages 7 à 28, nouvelle, trad. Denis E. SAVINE & Julia VANIDZE
2 - Tout a un prix, pages 29 à 41, nouvelle, trad. Denis E. SAVINE & Julia VANIDZE
3 - Prothèse, pages 43 à 54, nouvelle, trad. Denis E. SAVINE & Julia VANIDZE
4 - Panspermie, pages 55 à 66, nouvelle, trad. Denis E. SAVINE & Julia VANIDZE
5 - Avant l'accalmie, pages 67 à 82, nouvelle, trad. Denis E. SAVINE & Julia VANIDZE
6 - Une bonne action, pages 83 à 103, nouvelle, trad. Denis E. SAVINE & Julia VANIDZE
7 - A chacun son destin, pages 105 à 117, nouvelle, trad. Denis E. SAVINE & Julia VANIDZE
8 - Les Informations qui comptent, pages 119 à 133, nouvelle, trad. Denis E. SAVINE & Julia VANIDZE
9 - Parfois ils reviennent, pages 135 à 144, nouvelle, trad. Denis E. SAVINE & Julia VANIDZE
10 - Utopia, pages 145 à 160, nouvelle, trad. Denis E. SAVINE & Julia VANIDZE
11 - Une pour tous, pages 161 à 172, nouvelle, trad. Denis E. SAVINE & Julia VANIDZE
12 - Apparition, pages 173 à 189, nouvelle, trad. Denis E. SAVINE & Julia VANIDZE
13 - Toucher le fond, pages 191 à 207, nouvelle, trad. Denis E. SAVINE & Julia VANIDZE
14 - Deus ex machina, pages 209 à 231, nouvelle, trad. Denis E. SAVINE & Julia VANIDZE
15 - Pas de ce monde, pages 233 à 242, nouvelle, trad. Denis E. SAVINE & Julia VANIDZE
16 - Avant et après, pages 243 à 253, nouvelle, trad. Denis E. SAVINE & Julia VANIDZE
Critiques

   Les seize nouvelles du recueil composent le portrait acide, cynique et railleur de la Russie d’aujourd’hui, celle de Poutine et d’une oligarchie corrompue, qui épingle politiques, journalistes, hommes d’affaires, mais aussi les naïfs et les timorés, alcooliques ou rêveurs intègres, victimes consentantes d’un système oppressant. Ici, n°1 change parfois de place avec n°2 pour conserver le pouvoir, l’animateur de télévision en baisse de popularité propose une émission où les hommes politiques s’affrontent physiquement dans une arène de boue (le nom de Nemstov, opposant assassiné en plein jour dans la rue, n’est pas changé), les informations s’ingénient à ne diffuser que les bonnes nouvelles, tandis que la corruption règne à tous les niveaux, faisant des immigrés la matière première d’un trafic bien plus lucratif que le travail au noir. L’honnêteté devient une entreprise risquée pour l’enquêteur trop scrupuleux.

   La charge est féroce : c’est par l’absurde que Glukhovski dénonce les aberrations économiques de son pays, imaginant que les montgolfières poussés par le vent récupèrent l’argent qui se condense sur ses parois ; à ceux qui s’inquiètent d’une éventuelle chute du vent, les politiques prétendent la chose impossible : « Depuis lafondation même de l’Étatrusse, on a toujours fabriqué l’argent à partir du vent ! »

   La Mère Patrie du recueil est ici un concept destiné à fédérer une nation autour d’un sentiment patriotique, qu’un publicitaire est chargé de réactiver. Patrie est justement le nom de l’ouvrière qui découpe dans les magazines les portraits de son chanteur de boys band préféré, chacun représentant un type masculin : « Voilà longtemps que les producteurs américains ont réduit l’âme féminine à un algorithme.  » Sauf qu’en Russie, les filles de l’atelier sont toutes amoureuses de la même effigie, celle du Leader dont le portrait s’affiche partout.

   Le grotesque et le dérisoire dominent largement, quand, voulant faire disparaître les preuves d’alcool et de sexe à bord de la station spatiale, les occupants provoquent une catastrophe planétaire, ou lorsque le journaliste rêvant de scoop se voit empêché de diffuser en direct une visite extraterrestre en raison de la prééminence des discours politiques.

   Le fantastique et la science-fiction sont déclinés sur le ton de la fable : le pays a passé contrat avec l’Enfer, le politique et le clergé sont des extraterrestres prêt à fuir sur un autre monde à asservir en cas de problème, les gens procèdent à des implants intellectuels, prétexte à un humour vache, avec le package « Blonde intellectuelle » ou l’implant, pour les hommes, d’un cerveau en silicone. Souvent, les mesures adoptées se retournent contre leur concepteur, surtout quand la vodka, l’essence de la Russie et même objet de foi, est frelatée aux nanobots.

   Si la parole s’est libérée dans l’ex-Union Soviétique, les problèmes demeurent et Glukhovsky, ancien journaliste, reconverti comme on sait dans l’écriture avec succès (Métro 2033 et ses suites, SumerkiFutu.re), sort la grosse artillerie et ne mâche pas ses mots. Au final, tout le monde en prend pour son grade. Les idées sont parfois simplistes et les récits ne s’embarrassent pas de subtilités, l’intrigue est menée au bulldozer, mais ces facilités sont compensées par un sens de la formule et de l’image choc qui font mouche. Dans le registre de la satire, un recueil plutôt réjouissant.

Claude ECKEN (lui écrire)
Première parution : 1/4/2018 dans Bifrost 90
Mise en ligne le : 22/4/2023

retour en haut de page

Dans la nooSFere : 87292 livres, 112201 photos de couvertures, 83728 quatrièmes.
10815 critiques, 47164 intervenant·e·s, 1982 photographies, 3915 adaptations.
 
NooSFere est une encyclopédie et une base de données bibliographique.
Nous ne sommes ni libraire ni éditeur, nous ne vendons pas de livres et ne publions pas de textes. Trouver une librairie !
A propos de l'association  -   Vie privée et cookies/RGPD