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Tigane

Guy Gavriel KAY

Titre original : Tigana, 1990
Première parution : Viking, 1990   ISFDB
Traduction de Corinne FAURE-GEORS
Illustration de Larry ROSTANT

L'ATALANTE (Nantes, France), coll. La Dentelle du Cygne précédent dans la collection suivant dans la collection
Dépôt légal : janvier 2018, Achevé d'imprimer : janvier 2018
Réédition
Roman, 768 pages, catégorie / prix : 10
ISBN : 978-2-84172-842-8
Format : 14,5 x 20,0 cm
Genre : Fantasy

Texte revu par la traductrice.


Quatrième de couverture

« Mon troisième verre de la soirée est bleu, dit Alessan. Je bois toujours du vin bleu au troisième verre. En mémoire de quelque chose que j’ai perdu. De crainte qu’une nuit j’oublie ce pour quoi j’existe. »

     La bataille de la Deisa – où le prince Valentin a disparu, défait par l’armée et la sorcellerie du roi conquérant Brandin d’Ygrath – a scellé le sort de la péninsule de la Palme. Longtemps déchirée par les querelles intestines de ses provinces États, la voici sous la férule partagée de Brandin et d’Alberico de Barbadior, tyrans et maîtres sorciers.
La résistance renaîtra d’une poignée d’hommes et de femmes conduits par le prince héritier Alessan, sous le masque de ménestrels et de marchands itinérants. Une longue et dangereuse croisade les attend, pour libérer la Palme et ramener au jour le nom même du pays de Tigane et l’éclat de son histoire, éradiqués de toutes les mémoires par la vengeance du roi sorcier.
     Dans ce monde inspiré de l’Italie de la Renaissance, Guy Gavriel Kay compose une épopée fantastique d’une puissance et d’une originalité rares. Les passions humaines et politiques y vibrent à la mesure d’un grand roman d’aventures pathétique, qui se lit aussi comme une métaphore de l’impérialisme, de l’occupation, de l’exil en son propre pays et de la lutte de libération.

Critiques des autres éditions ou de la série
Edition J'AI LU, Fantastique (2000 - 2007) (2003)

    Si cette histoire se déroule dans un monde imaginaire, l'auteur canadien, comme dans la plupart de ses œuvres, s'inspire (très librement) de situations historiques familières. Ainsi, la péninsule de la Palme a pour modèle l'Italie, avant son Risorgimento à la fin du XIXe siècle. Divisée entre neuf provinces, qui partagent un passé émaillé de guerres et de conflits malgré une langue, une religion et une culture communes, elle a succombé vingt ans auparavant sous les invasions successives des deux puissances du continent voisin. Les provinces de l'Est sont maintenant tenues par Alberico, guerrier-mage travaillant pour le compte de l'Empire de Barbardior, tandis que la partie occidentale vit sous la férule de Brandin, roi d'Ygrath, également sorcier. Si tout le territoire de la Palme souffre de l'occupation et des exactions des deux Tyrans, une province a subi un sort particulièrement abject : Tigane. Parce que son fils est tombé sur le champ de bataille face aux armées de Tigane, Brandin a exercé sur elle une vengeance implacable, non seulement en éliminant ses hommes et en rasant ses villes, mais en jetant une malédiction terrible. Depuis vingt ans, il a effacé la mémoire de son nom de tous les vivants nés à l'extérieur de son territoire, le remplaçant par l'appellation de Basse-Corte (insulte suprême, la province de Corte ayant toujours été la grande rivale de Tigane). Et grâce a sa magie, il entend rester en vie et maintenir cette malédiction jusqu’à la disparition du dernier survivant de la guerre.

    Mais Brandin n'a pas tenu compte de la ténacité du peuple de Tigane, et surtout de la génération qui a grandi sous l'occupation. Menés par Alessan, le prince héritier, ces jeunes gens vont patiemment tisser un réseau clandestin de résistance à travers la Palme, attendant une opportunité, la faille qui permettrait non seulement la levée du sort concernant Tigane, mais la libération de la péninsule tout entière. Leurs espoirs restent minces, cependant, vu la supériorité écrasante des Tyrans, de leurs armées et de leur sorcellerie. La clé pourrait être Dianora, beauté originaire de Tigane et infiltrée dans le sérail de Brandin, dont elle devenue la favorite. Mais que vaut son serment, quand on est amoureuse de l'homme qu'on doit tuer ?

    Le roman de Kay est très riche de tout point de vue. Comme histoire de la lutte d'un peuple pour conserver ses droits, et son identité même, face à l'impérialisme, il reste tout à fait pertinent à l'heure actuelle. Mais l'auteur n'a pas la main trop lourde ; il privilégie surtout l'intrigue et le jeu des personnages, tout en nous dépeignant par petites touches le tableau très vivant d'une société complexe, avec ses mœurs, coutumes et croyances, d'ailleurs fort différentes des nôtres sur certains plans. Il convient également de préciser que Kay évite soigneusement toute forme de manichéisme et que les acteurs, dans tous les camps, se voient confrontés à des dilemmes moraux, où ils doivent effectuer des choix difficiles entre les moyens et les fins, sacrifier certains principes et en subir les conséquences. Loin de célébrer un retour à l'ordre ancien (même si la nostalgie et le sens du « terroir » sont très importants dans ce livre) ou un progrès triomphal vers des lendemains qui chantent, Kay nous montre plutôt l'enfantement du neuf dans la douleur, la confusion et la détresse. C'est un très bel exemple de cet oiseau rare : une fantasy « réaliste ».

Tom CLEGG (lui écrire)
Première parution : 1/5/2003
Asphodale 3
Mise en ligne le : 3/3/2025


Edition L'ATALANTE, Bibliothèque de l'évasion (1999)

     Tu laisseras tout ce que tu aimes, ce qui t'es le plus cher : c'est là le trait que l'arc de l'exil décoche en premier.
Dante, la divine comédie.     

     Deux rois sorciers ont conquis les neuf provinces de la Palme. Il y a quinze ans, leurs armées ont débarqué, l'une à l'ouest, l'autre à l'est, et ont affronté les neuf provinces divisées par leurs rivalités intestines. Une à une, la Corte, la Basse Corte, le Certando, l'Asoli, le Ferraut, l'Astibar, la Tregea et même l'orgueilleuse Chiara sur son île se sont inclinées. La dernière province, le Senzio, n'est plus qu'un enjeu entre les deux sorciers. Et le peuple de la Palme courbe l'échine et paye l'impôt à ses occupants, oubliant peu à peu sa fierté dans le khav et le vin bleu...
     Devin di Asoli est un jeune musicien accompagnant une troupe itinérante. Par curiosité et par chance, il va se retrouver mêlé à un groupe secret d'hommes et de femmes opposés aux deux tyrans et décidés à rendre sa liberté à la Palme. Une longue quête commencera alors pour redonner à la Palme l'honneur et l'éclat qui étaient le sien.

     Guy Gavriel Kay aime les vastes histoires épiques impliquant des personnages tendus par leurs dilemmes et leurs contradictions. Le voyage accompli par Devin, Catriana, Adreano et leurs compagnons vous fera découvrir de nombreux lieux de la péninsule de la Palme, très inspirée par l'Italie de la Renaissance. C'est la construction et l'originalité de son monde, ainsi que la richesse de ses personnages qui font le charme de ce roman. Loin des stéréotypes du genre, les personnages de Kay sont humains, attachants ou agaçants mais jamais neutres ; et si ses héros sont marquants, leurs ennemis le sont encore plus ; j'ose penser que vous n'oublierez pas facilement la figure royale et torturée de Brandin d'Ygrath.

     On peut reprocher à ce roman ses quelques longueurs car l'intrigue de ses 700 pages aurait sans doute tenu sur 500. On pourrait aussi lui reprocher, mais à tort selon moi, d'avoir pris clairement appui sur une époque et un cadre historique donné pour construire son univers. Pourquoi à tort ? Parce que tout univers imaginaire est basé sur des références communes à l'auteur et au lecteur, que ce soit un univers de Fantasy ou de science-fiction. Les références que Kay a eu la bonne idée de choisir (l'Italie pleine d'intrigues et de divisions de la Renaissance, patrie de Machiavel comme de Michel Ange) lui permet de créer un cadre original sans avoir à traîner d'interminables descriptions pour réinventer l'architecture, la société ou la culture de son monde.

     Enfin, last but not least, Tigane est un roman mature. Kay prouve que ce n'est pas parce qu'il place son histoire dans un monde imaginaire qu'il ne peut traiter de sujets comme l'identité, l'exil ou la destruction d'une culture. Et loin d'être des oripeaux destinés à ranger le livre dans un genre donné, les éléments fantastiques (magie, créatures fabuleuses) sont autant là pour faire rêver que pour servir l'histoire. Tigane fait partie de ces romans qui vous emmènent dans un monde et vous donnent envie d'y rester quand vous les finissez... Guy Gavriel Kay a assimilé là une des meilleures leçons de Tolkien.

Laurent KLOETZER (site web)
Première parution : 1/12/1999
Yellow Submarine 129

Prix obtenus
Aurora (anciennement Casper), Roman anglais, 1991


Cité dans les Conseils de lecture / Bibliothèque idéale des oeuvres suivantes
André-François Ruaud : Cartographie du merveilleux (liste parue en 2001)
Jean-Pierre Fontana : Sondage Fontana - Fantasy (liste parue en 2002)

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