L'auteur des Chroniques martiennes et de Fahrenheit 451 est-il encore à présenter ? Né en 1920, Ray Bradbury a non seulement alimenté copieusement la littérature de science-fiction, mais également le théâtre, l'opéra et le cinéma (il a signé le scénario du Moby Dick de John Huston).
Il y a Cecy qui extrait les âmes, à l'ouest d'octobre, histoire de faire un tour chez les fous, mais aussi un voyageur temporel âgé de cent trente ans, et l'homme étrange du compartiment 22, qui se meurt dans l'Orient-Express... Et bien d'autres mystères au fil des vingt-trois récits de ce recueil. Un ouvrage débordant d'humour, de truculence, de poésie, qui voyage de la science-fiction au fantastique en passant par les quotidiens décalés, avec toujours l'humanisme jovial qui caractérise l'œuvre de Ray Bradbury.
8 - Tu te demandes sans doute ce qu'on fait ici ? (I Suppose You Are Wondering Why We Are Here, 1984), pages 119 à 135, nouvelle, trad. Alain DORÉMIEUX
13 - Un coup pour sa Seigneurie, et un coup pour la route ! (One for His Lordship, and One for the Road!, 1985), pages 199 à 212, nouvelle, trad. Jacques CHAMBON
A l’ouest d’octobre est un recueil caractéristique de la fin de carrière de Ray Bradbury : on y trouve beaucoup de fantastique, un peu de littérature dite générale, et un peu de science-fiction. « Le Convecteur Toynbee », qui donne son titre original à l’ouvrage, est un parfait condensé de la philosophie bradburienne. Un voyageur temporel ayant contemplé un futur brillant, qu’il a notamment pris en photos, s’apprête à fêter le centième anniversaire de son unique voyage vers le futur, personne n’a voyagé dans le temps avant lui, personne n’y est retourné ensuite. Son secret (qu’il se fait pour l’occasion un malin plaisir d’éventer) : il n’a jamais quitté son époque, ses photos sont d’habiles trucages et son futur lumineux est devenu une prophétie auto-réalisatrice. L’extrême naïveté du texte choque à première vue, mais ce serait oublier que Ray Bradbury fut très ami avec Ray Harryhausen (le poète des effets spéciaux), ce serait oublier que l’on considère ici un auteur trop malin pour ne pas se rendre compte de la faille centrale de son texte. Mais alors, dans ce cas, que veut-il nous dire ? Juste que nous devrions accepter la vie (et donc le futur) comme nous acceptons (encore aujourd’hui) les trucages de Harryhausen, comme nous acceptons leur artisanat, leur magie faite de sincérité et d’amour des genres merveilleux (dont la science-fiction fait partie). D’ailleurs, cette guerre contre le cynisme ambiant (dont nous, Français, serions les champions du monde si on en croit maître Bradbury) se retrouve aussi dans « Le Voyageur de l’Orient Express » et dans « L’Authentiquemomie égyptiennefaitemaisonducolonelStonesteel », deux autres pépites de ce recueil. Dans « LeDerniercirque », l’auteur nous invite à une sorte de négatif de son chef-d’œuvre La Foire des ténèbres. Dans « La Trappe », énième histoire de maison hantée, il transforme une idée idiote en idée marquante (c’est aussi ça le talent).
A l’ouest d’octobre est un recueil pour convaincus. Il se savoure comme un retour au pays, aux automnes, à Green Town, dans les foires provinciales et les cirques, les maisons hantées et les vieux trains pleins de charbon et de rouille, soufflant vapeur et escarbilles. Un recueil qu’on lira donc après les classiques : Les Pommesd’ordu soleil, L’Homme illustré, La Foire des ténèbres, Le Pays d’octobre.