Site clair (Changer
 
    Fiche livre     Connexion adhérent
La Fille-flûte et autres fragments de futurs brisés

Paolo BACIGALUPI

Titre original : Pump Six and Other Stories, 2008
Première parution : Night Shade, 2008   ISFDB

Illustration de Aurélien POLICE

J'AI LU (Paris, France), coll. Science-Fiction (2007 - ) précédent dans la collection n° 11232 suivant dans la collection
Dépôt légal : septembre 2015, Achevé d'imprimer : 14 septembre 2015
Réédition
Recueil de nouvelles, 416 pages, catégorie / prix : 8,40 €
ISBN : 978-2-290-03265-7
Format : 11,0 x 17,8 cm
Genre : Science-Fiction


Ressources externes sur cette œuvre : quarante-deux.org
Ressources externes sur cette édition de l'œuvre : quarante-deux.org

Quatrième de couverture
     Des esclaves au corps modifié pour répondre aux besoins de leurs maîtres, des humains qui se sont adaptés à la pollution qu’ils ont eux-mêmes engendrée, de singuliers gardiens chargés d’éviter une nouvelle apocalypse en distillant leur savoir avec parcimonie, un généticien qui pourrait changer le monde, des rivières privatisées, des tueurs d’enfants agissant pour le compte du gouvernement — il faut bien limiter la surpopulation — , le tout sous le regard étrangement désabusé de la fille automate... Dix nouvelles, dix fragments de futurs brisés, qui nous renvoient une image déformée, mais ô combien pénétrante, de notre présent.
 
     PAOLO BACIGALUPI
     Récompensé par une kyrielle de prix littéraires (dont les très convoités Hugo, Nebula et Locus) pour son roman choc La fille automate, cet Américain du Colorado, né en 1972, s’est ensuite consacré à des romans plus légers (Ferrailleurs des mers, Les cités englouties), voire carrément allumés (Zombie Ball). La fille-flûte, que d'aucuns considèrent comme son meilleur ouvrage, donne à voir la diversité de ses talents de nouvelliste.
 
     Prix Locus 2009, meilleur recueil de nouvelles
Sommaire
Cacher les différentes éditions des textes
1 - La Fille-flûte (The Fluted Girl, 2003), pages 7 à 44, nouvelle, trad. Sara DOKE
3 autres éditions de ce texte dans nooSFere :
- in Fiction - tome 2 (MOUTONS ÉLECTRIQUES (LES), 2005)
- in La Fille-flûte et autres fragments de futurs brisés (AU DIABLE VAUVERT, 2014)
- in Architectes du vertige (BÉLIAL', 2024)

2 - Peuple de sable et de poussière (People of sand and slag, 2004), pages 45 à 78, nouvelle, trad. Julien BÉTAN
2 autres éditions de ce texte dans nooSFere :
- in Fiction - tome 12 (MOUTONS ÉLECTRIQUES (LES), 2011) sous le titre Gens du sable et de la poussière
- in La Fille-flûte et autres fragments de futurs brisés (AU DIABLE VAUVERT, 2014)

3 - Du dharma plein les poches (Pocketful of Dharma, 1999), pages 79 à 116, nouvelle, trad. Sara DOKE
1 autre édition de ce texte dans nooSFere :
- in La Fille-flûte et autres fragments de futurs brisés (AU DIABLE VAUVERT, 2014)

4 - Le Pasho (The Pasho, 2004), pages 117 à 156, nouvelle, trad. Sara DOKE
1 autre édition de ce texte dans nooSFere :
- in La Fille-flûte et autres fragments de futurs brisés (AU DIABLE VAUVERT, 2014)

5 - L'Homme des calories (The Calorie Man, 2005), pages 157 à 211, nouvelle, trad. Sébastien BONNET
2 autres éditions de ce texte dans nooSFere :
- in Fiction - tome 8 (MOUTONS ÉLECTRIQUES (LES), 2008) sous le titre Le Calorique
- in La Fille-flûte et autres fragments de futurs brisés (AU DIABLE VAUVERT, 2014)

6 - Le Chasseur de Tamaris (The Tamarisk Hunter, 2006), pages 213 à 232, nouvelle, trad. Sara DOKE
1 autre édition de ce texte dans nooSFere :
- in La Fille-flûte et autres fragments de futurs brisés (AU DIABLE VAUVERT, 2014)

7 - Groupe d'intervention (Pop Squad, 2006), pages 233 à 275, nouvelle, trad. Laurent QUEYSSI
2 autres éditions de ce texte dans nooSFere :
- in Fiction - tome 6 (MOUTONS ÉLECTRIQUES (LES), 2007)
- in La Fille-flûte et autres fragments de futurs brisés (AU DIABLE VAUVERT, 2014)

8 - Le Yellow Card (Yellow Card Man, 2006), pages 277 à 331, nouvelle, trad. Sara DOKE
1 autre édition de ce texte dans nooSFere :
- in La Fille-flûte et autres fragments de futurs brisés (AU DIABLE VAUVERT, 2014)

9 - Plus doux encore (Softer, 2007), pages 333 à 351, nouvelle, trad. Sara DOKE
1 autre édition de ce texte dans nooSFere :
- in La Fille-flûte et autres fragments de futurs brisés (AU DIABLE VAUVERT, 2014)

10 - La Pompe six (Pump Six, 2008), pages 353 à 410, nouvelle, trad. Claire KREUTZBERGER
2 autres éditions de ce texte dans nooSFere :
- in Fiction - tome 15 (MOUTONS ÉLECTRIQUES (LES), 2012)
- in La Fille-flûte et autres fragments de futurs brisés (AU DIABLE VAUVERT, 2014)

Critiques des autres éditions ou de la série
Edition AU DIABLE VAUVERT, (2014)

            À bien des égards, le format court plaît à la science-fiction. Du moins, si l’on se fie aux nombreux chefs-d’œuvre qui jalonnent le genre. Plus concise, plus concentrée et efficace, la nouvelle s’apparente à un instantané dont la puissance d’impression se trouve décuplée par le talent de son auteur. Elle s’avère aussi plus exigeante et ne pardonne pas lorsqu’elle tombe à plat.

            À l’instar de ses pairs, avant d’être multiprimé pour son premier roman La Fille automate (critique in Bifrost n°66), Paolo Bacigalupi a fait ses classes en écrivant des nouvelles. La majeure partie a été rassemblée dans le recueil Pump Six and other stories traduit en France au Diable vauvert sous le titre de La Fille-flûte. On pourrait juger cette parution un tantinet tardive, d’autant plus que cinq des dix textes ne sont pas inédits, figurant en effet au sommaire de la revue Fiction. Ce serait regrettable car, en ces temps de vaches maigres, ce recueil n’usurpe pas sa réputation de must-read comme on va le voir.

            La Fille-flûte (autant utiliser son titre français) démontre ô combien la science-fiction se révèle salutaire lorsqu’elle ne se cantonne pas à ses vieilles et distrayantes marottes. Elle apparaît même comme le seul médium apte à interroger le présent en sondant ses multiples évolutions futures. En investissant les enjeux humains, sociétaux et technoscientifiques pour en faire les outils d’une fiction spéculative, éthique, voire politique, la SF démontre sa nécessité et son caractère précieux. De l’humain, le recueil de Paolo Bacigalupi n’en manque pas. Foisonnante, inventive, engagée dans un combat pour sa survie et sa liberté, l’humanité de La Fille-flûte nous renvoie à nos préoccupations d’espèce vivante tiraillée entre la permanence et le changement. À l’instar de John Brunner, l’auteur américain aborde le futur sous l’angle de la prospective, faisant de la question écologique et de celle de la rareté le moteur de l’évolution humaine. La Fille-flûte offre un aperçu de l’anthropocène, cet âge de la Terre où l’humain est devenu une force capable de modeler (ou détruire) la biosphère, et d’adapter sa propre nature aux changements que ses activités ont impulsé. Un aperçu sombre qui remet en perspective la notion de progrès. L’eau et la possession des autres ressources vitales deviennent ainsi l’enjeu de convoitises et de conflits qui redessinent la carte du monde en faveur d’une géopolitique que l’on croyait révolue avec la fin des colonies et l’avènement de l’utopie du village mondial. Continuation de la domination d’une minorité sur la majorité, les fragments du futur imaginés par Paolo Bacigalupi déploient des paysages où se mêlent les manifestations tapageuses des technosciences et les pratiques séculaires de la prédation. Comme Ian McDonald, l’auteur ne craint pas de mettre en scène les mondes émergents, optant pour le point de vue des plus démunis pour traiter de la privatisation du vivant, de la transition énergétique, des conséquences du réchauffement climatique et de la pollution. Il pose également des questions cruciales sur la condition d’être humain. Quelle dose de changement celui-ci est-il prêt à accepter sans abdiquer son empathie ?

            Des dix nouvelles inscrites au sommaire, il n’y a pas grand-chose à jeter. On retiendra surtout « Peuple de sable de poussière », où l’auteur imagine la rencontre entre un trio de post-humains, affectés à la garde d’une concession minière, et d’un chien perdu. Toute vie naturelle étant désormais impossible sur Terre en raison de la pollution et de la surexploitation, nos trois bougres se demandent comment un tel fossile vivant a pu survivre. L’animal les distrait pour un temps de leurs occupations habituelles – se couper les membres et les regarder repousser. Il réveille aussi un truc archaïque, terré dans un coin de leur caboche, dont ils ont oublié le nom, mais qui leur fait tout drôle, au moins provisoirement. Changement de tropisme avec « Le Pasho », où Bacigalupi rejoue l’affrontement entre la tradition et le changement avec une problématique qui n’est pas sans rappeler celle de Kirinyaga de Mike Resnick. Assez réussi pour son ambiance, mais pas davantage. Avec « Le Chasseur de Tamaris », l’auteur retrouve la veine écologique, celle où il s’exprime de la façon la plus talentueuse. Ici, l’histoire se déroule dans le Sud-Ouest des États-Unis. L’eau étant devenue une denrée précieuse, les mégalopoles en viennent à faire la guerre pour assécher l’arrière-pays désormais laissé aux « tiques d’eau », ces marginaux ne renonçant pas à cultiver un lopin de terre, histoire de rester libres. Sur l’air bien connu du pot de terre contre le pot de fer, la nouvelle évoque le spleen du pionnier voyant s’effacer de son vivant la Frontière et son absence de contraintes sociales.

            « L’Homme des calories » et « Le Yellow Card » s’inscrivent dans le même futur que La Fille automate. Un avenir crédible, sombre, abordé du point de vue des plus miséreux. Le premier texte nous emmène au fil du Mississippi, en compagnie d’un réfugié climatique contraint de trafiquer pour survivre. Contacté par un ami pour exfiltrer un passager recherché par les compagnies caloriques, le voilà embarqué dans un périple dangereux au milieu des cultures transgéniques, des patrouilles de la PI, des barges de céréales et des cités abandonnées aux Cheschire, ces chats caméléons qui ont supplanté leur souche naturelle. Le second offre un aperçu du Bangkok de La Fille automate. Le texte peut se lire à la fois comme un prélude au roman ou une préquelle pour ceux qui l’ont déjà lu.

            Ces cinq nouvelles justifient déjà à elles seules l’achat du recueil. Mais, si le doute persiste, « La Pompe six » vient le lever définitivement. Avec cette novelette, on touche en effet à la perfection. Portrait d’une ville tombée en déshérence, en passe d’être submergée par sa propre merde, le texte nous décrit la fin du monde, au rythme nonchalant des pluies de béton et des pannes à répétition. On assiste à une sorte de dévolution tranquille, une catastrophe au ralenti bien plus irrémédiable que tous les fléaux cinématographiques. Un texte très fort, récompensé à juste titre par un prix Locus.

            Arrivé au terme de cette longue chronique, force est de reconnaître le caractère incontournable de La Fille-flûte. On est frappé à la fois par l’effet de réel du recueil, par les émotions et les spéculations que Paolo Bacigalupi arrive à brasser en si peu de mots. Un must-read, on vous dit !

Laurent LELEU
Première parution : 1/10/2014
Bifrost 76
Mise en ligne le : 20/4/2020

Prix obtenus
Grand Prix de l'Imaginaire, Nouvelle étrangère, 2015
Locus, Recueil, 2009

Le Calorique : Theodore Sturgeon [sans catégorie], 2006
La Pompe six : Locus novelette, 2009
Le Yellow Card : Asimov's (prix des lecteurs) novelette, 2007

retour en haut de page

Dans la nooSFere : 87473 livres, 112486 photos de couvertures, 83912 quatrièmes.
10893 critiques, 47248 intervenant·e·s, 1986 photographies, 3916 adaptations.
 
NooSFere est une encyclopédie et une base de données bibliographique.
Nous ne sommes ni libraire ni éditeur, nous ne vendons pas de livres et ne publions pas de textes. Trouver une librairie !
A propos de l'association  -   Vie privée et cookies/RGPD