GALLIMARD
(Paris, France), coll. Folio SF n° 358 Dépôt légal : août 2019, Achevé d'imprimer : 13 août 2020 Retirage Recueil de nouvelles, 412 pages, catégorie / prix : F8 ISBN : 978-2-07-040688-3 Format : 10,8 x 17,8 cm Genre : Science-Fiction
Coquille sur le nom du traducteur en 4e de couverture (Puùgi au lieu de Pugi).
À Babylone, la construction de la tour touche à sa fin. On va bientôt atteindre la voûte du ciel et découvrir les secrets de Jéhovah.
Une mathématicienne aurait trouvé une démonstration capable de mettre à mal les mathématiques, sa vie de couple... et sa vie, tout court.
Le premier contact avec les extraterrestres aura également des répercussions inattendues sur le quotidien d'une linguiste réputée.
Le destin de Neil Fisk bascule le jour où sa femme est tuée par la visitation d'un ange...
Huit nouvelles qui constituent l'intégrale des oeuvres de l'auteur entre 1990 et 2002. Huit textes d'une puissance inégalée, lauréats pour la plupart des principaux prix du genre : Hugo, Nebula, Theodore Sturgeon, Sidewise... Huit occasions de découvrir le talent d'un nouveau grand de la science-fiction mondiale.
Ted Chiang est né en 1967 à Port Jefferson, État de New York. Il vit actuellement dans la région de Seattle où il travaille dans l'industrie informatique.
1 - La Tour de Babylone (Tower of Babylon, 1990), pages 9 à 46, nouvelle, trad. Pierre-Paul DURASTANTI 2 - Comprends (Understand, 1991), pages 47 à 106, nouvelle, trad. Jean-Pierre PUGI 3 - Division par zéro (Division by Zero, 1991), pages 107 à 136, nouvelle, trad. Jean-Pierre PUGI 4 - L'Histoire de ta vie (Story of Your Life, 1998), pages 137 à 211, nouvelle, trad. Pierre-Paul DURASTANTI 5 - Soixante-douze lettres (Seventy-Two Letters, 2000), pages 213 à 294, nouvelle, trad. Jean-Pierre PUGI 6 - L'Évolution de la science humaine (The Evolution of Human Science / Catching Crumbs from the Table, 2000), pages 295 à 300, nouvelle, trad. Pierre-Paul DURASTANTI 7 - L'Enfer, quand Dieu n'est pas présent (Hell is the absence of God, 2001), pages 301 à 342, nouvelle, trad. Pierre-Paul DURASTANTI 8 - Aimer ce que l'on voit : un documentaire (Liking what you see, a documentary, 2002), pages 343 à 399, nouvelle, trad. Jean-Pierre PUGI 9 - Notes sur les textes, pages 401 à 406, notes, trad. Pierre-Paul DURASTANTI & Jean-Pierre PUGI 10 - Remerciements, pages 407 à 407, notes, trad. Pierre-Paul DURASTANTI
Ted Chiang appartient à une curieuse famille d'écrivains. Celle d'auteurs dont on n'entend jamais — ou rarement — parler et qui, tout d'un coup, surgissent comme des météores éblouissants dans le ciel. La famille un peu retirée des écrivains trop rares, mais surdoués. Huit nouvelles publiées entre 1991 et 2002, c'est peu. Ces huit nouvelles traduites et réunies chez Denoël dans le recueil La Tour de Babylone, c'est un plaisir raffiné !
Chacun de ces textes est un petit bijou d'orfèvrerie littéraire. Ted Chiang doit certainement passer beaucoup de temps à polir ses écrits avant de les livrer au public, ce qui expliquerait son manque de prolixité. Mais, d'emblée, en se plongeant dans l'histoire du mineur Hillalum, dont la tâche sera de creuser la voûte du ciel au sommet de la tour de Babylone, le lecteur entre dans le texte comme dans de la matière : c'est dense, c'est solide, c'est immense, ça a l'air réel. La crédibilité est au rendez-vous, même quand les mineurs s'acharnent à percer le ciel. La Tour de Babylone est une nouvelle impressionnante et belle, dont la chute crée une nouvelle cosmogonie, pas moins.
Avec la science en leur cœur, écrits avec une implacable logique et un évident esprit scientifique, les textes de Ted Chiang sont parfois d'un accès difficile. Science médicale, avec un traitement hormonal qui donne au narrateur de Comprends une intelligence véritablement surhumaine. Science mathématique, dans Division par zéro, une histoire ardue dans laquelle une mathématicienne perturbée parvient à démontrer logiquement la fausseté de son sujet d'études. Science linguistique, dans cette admirable nouvelle intitulée L'histoire de ta vie, où une mère parle à sa fille de ses tentatives de communication avec des extraterrestres débarqués sur notre planète. Elle y use d'un temps inédit, genre passé-futur, en des phrases du style : « Je me souviens d'un jour d'été quand tu auras seize ans ». Écriture originale, certes, mais liée de si près au langage des extraterrestres qu'elle finira par percer... et qui découle de l'intérêt que Chiang porte aux principes variationnels en physique ! La beauté insolite d'une hypothèse scientifique poussée dans ses derniers retranchements.
La science, oui, mais aussi la religion. Soixante-douze lettres revisite le thème du golem et des automates, dans un récit assez pesant qui devient dynamique et haletant sur la fin. Formidable récit aussi, L'Enfer, quand Dieu n'est pas présent traite de la justice divine. L'incroyant Neil Fisk, dont la femme a été tuée par l'apparition de l'Ange Nathanaël, cherche à tout prix à découvrir un moyen d'aimer Dieu pour pouvoir la rejoindre au Paradis. Jusqu'à devenir un « chasseur de lumière » et à prendre tous les risques.
Le recueil se conclut sur une application future de la neurologie. Dans un récit à plusieurs voix, les opinions s'affrontent pour ou contre l'application pratique d'une technique qui permet d'inactiver la zone du cerveau qui perçoit la beauté. Plus de discrimination : tous les êtres humains sont maintenant égaux, quelle que soit leur apparence. Égaux, vraiment ?
Prix Nebula, Theodore Sturgeon Award, prix Hugo... Les nouvelles de Ted Chiang ont reçu ces récompenses. Ça aussi, c'est logique ! Peu d'auteurs sont capables, comme lui, d'évoquer des hypothèses scientifiques sous tous leurs aspects. Bien entendu, vous savez ce qu'il vous reste à faire ?...