J'AI LU
(Paris, France), coll. Fantasy (2007 - ) n° 7727 Dépôt légal : août 2005, Achevé d'imprimer : 4 mars 2008 Réédition Roman, 704 pages, catégorie / prix : 8,90 € ISBN : 2-290-33061-2 Format : 11,0 x 17,8 cm✅ Genre : Fantasy
À Sarance, les rumeurs courent au moins aussi vite que les auriges sur la piste de l'hippodrome impérial. Valérius II, le trois fois honoré, rassemblerait ses armées pour envahir la Batiare et redorer le blason de l'empire. Plus au sud, Shirvan, roi des rois de Bassanie, s'inquiète et avance ses propres pions sur l'échiquier de la vie politique sarantine. Crispin le mosaïste, venu à Sarance pour décorer le nouveau sanctuaire à la gloire de Jad, devient le témoin involontaire du ballet politique que les grands de ce monde dansent avec une frénésie croissante. Il va s'apercevoir qu'art et pouvoir sont bien souvent indissociables...
Guy Gavriel Kay
Né au Canada en 1954, il commence sa carrière en travaillant à l'édition posthume du Silmarillion de Tolkien. Si l'influence du père du Seigneur des Anneaux se ressent dans La tapisserie de Fionavar, Kay va vite s'en affranchir pour s'imposer comme l'un des chefs de file de la fantasy historique, avec des romans aussi remarquables que Tigane ou Les lions d'Al-Rassan.
« Le Seigneur des Empereurs est extraordinaire. Je n'attends jamais rien de moins de Guy Gavriel Kay. »
Second volet du diptyque « La Mosaïque Sarantine », Le Seigneur des empereurs fait suite à Voile vers Sarance, chroniqué dans le Bifrost 97. Il introduit un nouveau personnage, Rustem, un médecin Bassanien envoyé espionner Sarance, et qui, comme Crispin, est un autre étranger portant un regard extérieur sur les Sarantins. Un homme ordinaire évoluant, bien contre son gré, au cœur des intrigues tissées par trois femmes exceptionnelles pour s’emparer du pouvoir ou le conserver. Kay a toujours particulièrement soigné ses personnages, tout spécialement les féminins, mais il atteint sans doute ici le sommet de son art en la matière. S’il nous place au point où le paradigme bascule, où l’Histoire prend un nouveau cours, dans les pas des souverains et autres hauts personnages, il n’en oublie pas pour autant le sort des gens modestes. D’ailleurs, les scènes de plus grande envergure ne sont pas situées à la fin du roman, mais bien avant, et la conclusion met à nouveau en lumière l’art du mosaïste et celui qui lui donne vie.
La première partie (environ 240 pages) nous fait croire que le rythme restera aussi lent que dans le premier volet ; la seconde nous détrompe, faisant s’accélérer les événements et réservant au lecteur ébahi des scènes d’une intensité dramatique absolument extraordinaire. Si Voile vers Sarance pouvait laisser penser que le diptyque pouvait relever, dans un monde imaginaire où le surnaturel est réel, d’une allégorie du règne de Justinien et de Théodora, dans l’Histoire réelle, Le Seigneur des empereurs, en revanche, donne à ces personnages, ainsi qu’à l’équivalent de Bélisaire, un destin totalement inédit. Ainsi, la remarquable précision de la reconstitution de la Byzance de l’époque, jusque dans le comportement de ses souverains ou dans des citations à peine déguisées de L’Histoire secrète de Justinien, par Procope de Césarée, est mêlée à un cours de l’Histoire différent, et bien sûr à des phénomènes magiques.
Voile vers Sarance était un bon roman pour qui connaissait déjà et appréciait Kay. Le Seigneur des empereurs est d’un tout autre niveau, hissant l’ensemble du diptyque à des hauteurs vertigineuses, dignes du meilleur de sa bibliographie (qui regorge pourtant de très grands romans de fantasy historique). On ne pourra que recommander à qui veut découvrir la prose du Canadien de s’y intéresser (même s’il devra faire preuve de patience, tant la mise en place des dominos est lente – mais leur chute ébouriffante), et on conseillera même à ceux qui ne l’apprécient pas, d’habitude, de se faire violence, tant les événements d’une certaine nuit fatidique sont contés par l’auteur de manière extraordinaire, parfaitement servis par la remarquable traduction inédite de Mikael Cabon.
APOPHIS (site web) Première parution : 1/1/2021 Bifrost 101 Mise en ligne le : 29/6/2024