Après un numéro 18 plutôt convaincant, on aura du mal à trouver quelque chose d’intéressant dans ce numéro 19 qui exsude l’autosatisfaction comme un saucisson abandonné au soleil estival perd ses luisants lipides. Côté interviews croisés, le mariage Ian McDonald/Anne Fakhouri ne prend pas ; Fabrice Colin et Serge Lehman font leur show, ce qui n’est pas désagréable, plutôt même sympathique, mais ne va pas bien loin (on entend le coup de cymbale de music-hall après chaque échange de ping-pong culturel) ; on retient surtout de cette interview que Thomas Pynchon, c’est trop d’la balle. En même temps, c’est ce qu’on appelle un scoop !
Plus avant, quelques articles réinventent l’eau tiède, avec un ton assez désagréable, snobinard qui rappelle un peu Les Inrockuptibles dans leurs pires travers.
Côté fictions, on regrettera le côté « présentation à géométrie variable » des nouvelles et novellas ; certaines sont introduites par un collaborateur de la revue, d’autres par les auteurs, d’autres ne sont tout simplement pas présentées (ce qui est regrettable quand on ne connaît pas les auteurs). Pour ce qui est des textes en eux-mêmes, pas vraiment de coup de cœur à part pour celui de Felicity Shoulders, « Petites villes ». Le texte de James Morrow est une blague légère et relativement courte ; la novella de Kate Wilhelm est beaucoup trop longue, dénuée de style (problème de traduction ?), même si son fond est plutôt intéressant. Les autres textes sont corrects mais anecdotiques – Steven Utley, Jeffrey Ford et Estelle Faye –, voire carrément mauvais : « Chienne » de Robert Darvel.
Un numéro totalement dispensable et agaçant (surtout cette manie de foutre des BDs pourraves en plein milieu des nouvelles, ce qui fait aussi montre d’un manque de respect certain pour les auteurs). Agaçant et… affligeant. À vous de voir si la découverte du talent plus que prometteur de Felicity Shoulders (dont la jolie nouvelle évoque Hayao Miyazaki) mérite quinze euros d’investissement.