Jonathan SWIFT Titre original : Travels into Several Remote Nations of the World. In Four Parts. By Lemuel Gulliver / Gulliver's Travels, 1726 Première parution : Angleterre, Londres, Benjamin Motte, 28 octobre 1726ISFDB Traduction de Bernard-Henri GAUSSERON
SEUIL
(Paris, France), coll. L'École des lettres Dépôt légal : février 1994 Réédition Roman, 452 pages, catégorie / prix : 58 FF ISBN : 2-02-021557-8 ❌ Genre : Imaginaire
« Ma douceur et ma bonne conduite m'avaient si bien concilié l'empereur et sa cour, et même l'armée et le peuple en général, que je commençais à concevoir l'espérance de recouvrer bientôt ma liberté. Je pris tous les moyens possibles de cultiver cette favorable disposition. Les naturels en arrivaient insensiblement à ne plus tant redouter quelque danger de ma part. Parfois je me couchais à terre, et j'en laissais cinq ou six danser sur ma main. A la fin, les garçons et les filles se risquaient à venir jouer à cache-cache dans mes cheveux. J'avais maintenant fait de grands progrès à comprendre et à parler leur lange. Un jour, l'empereur eut l'idée de m'amuser par différents spectacles forains, dans lesquels cette nation surpasse toutes celles que j'ai connues pour l'adresser et la magnificence. Aucun ne me divertit autant que les exercices des danseurs de corde, exécutés sur un mince fil blanc de deux pieds de long à peu près, et à douze pouces au-dessus du sol ».
Ce classique de la littérature mondiale, publié à partir de 1699, est ici adapté par Jean-Pierre Kerloc'h pour les enfants, et mis en images par Emre Orhun. On ne fera pas l'injure ici de rappeler l'histoire, mais on se bornera à dire que sont ici narrés les deux épisodes de Lilliput (chez les êtres minuscules) et Brobdingnag (chez les géants). Il est d'ailleurs intéressant de noter que l'adaptateur a jugé bon de « franciser » certains termes, Brbdingnag devenant par exemple Grodingnac. On ne comprend pas trop les raisons de ce changement, à moins qu'il n'ait pensé que nos chères têtes blondes auraient pu être rebutées par tous ces mots inconnus à consonance bizarre. Toujours est-il que le lecteur habitué aux noms de Swift risque d'être un peu surpris.
Afin de faire pendant au texte, le livre présente des dessins pleine page d'Emre Ohrun, qui illustrent les scènes clé retenues par Jean-Pierre Kerloc'h. Le dessin est réussi, mais on s'interrogera néanmoins sur la noirceur des tableaux dans un livre destiné aux plus jeunes. Même si les aventures vécues par Gulliver ont entre autres comme vocation de faire frissonner les lecteurs, certains risquent fort d'être durablement dérangés par ces illustrations pleines de personnages grimaçants et aux teintes sanguines et ocre.
Bref, une adaptation aux partis pris évidents, un peu étonnante dans le cadre d'une collection destinée aux plus jeunes — et donc souvent plus influençables — lecteurs.