Il y a certes des sorciers et des dragons dans Terremer, mais la « fantasy » d'Ursula Le Guinn ne ressemble à aucune autre... Sur les îles de Terremer la magie s'apprend comme un e science et se pratique comme un art. Elle ne mène pas à la sorcellerie mais à une philosophie de la vie, une forme de sagesse... Terremer a en fait toutes les caractéristiques d'une série destinée aux adolescents. Ce sont des romans chastes et paisibles, d'où se dégage un climat prenant, et récits avec beaucoup de finesse.

Lorris Murail, Sciences et Avenir

 

     Ici, il y a des dragons et, là où il y a des dragons, il y a des enchanteurs, une mer immense et des îles.

     Mais le monde de Terremer n'est pas un univers conventionnel de fantaisie. Il n'appartient ni à notre passé, ni à notre avenir. Il est ailleurs. C'est un univers où la magie fonctionne et s'enseigne comme la science et la technologie dans le nôtre.

     Terremer contient trois livres : Le sorcier de Terremer raconte l'initiation de Ged en l'île de Roke et comment il devint sorcier, capable de commander aux éléments et d'affronter les dragons, et comment, aussi, son audace faillit le perdre.

     Les Tombeaux d'Atuan évoquent la terrible histoire de la petite fille Tenar, choisie pour devenir la Grande Prêtresse des Tombeaux, qui haïra Ged et finira par combattre avec lui l'emprise des innommables.

     Et enfin L'Ultime rivage où le pouvoir des sorciers sera soumis à celui du temps, le grand rongeur.

 

     Née en 1929 à Berkeley, Californie, Ursula Le Guin est la fille de l'ethnologue américain A.-L. Krœber. Elle a fait des études de littérature et d'histoire, notamment à Paris. Elle a publié à ce jour une dizaine de romans qui l'ont établie parmi les meilleurs écrivains américains de science-fiction : La Main gauche de la nuit (Prix Nebula 1969 et Prix Hugo 1970), Les Dépossédés (Prix Nebula 1974et Prix Hugo 1975), Le Nom du monde est forêt, etc. Mariée, elle vit à Portland (Oregon).

     Après Les soldats de la mer, l'excellent recueil d'Yves et Ada Remy, la nouvelle collection dirigée par Gérard Klein et Bernard Oudin nous propose la réédition en un volume du cycle de Terremer publié en trois tomes par Opta en 1977. Cette suite épique, pleine de sorcellerie, de monstres et de tempêtes, fait songer à Tolkien et, après les subtilités buzzatiennes d'Y. et A. Remy, montre que « fantastique » sera dans cette collection à prendre au sens large. C'est un choix louable, qui s'oppose à la tendance aux préjugés des lecteurs et à la manie des étiquettes et qui, par conséquent, est susceptible de faire progresser l'édition fantastique en France au moment où elle connaît un regain d'activité. Parallèle au cycle de Hain, Terremer se situe évidemment dans un tout autre registre, bien qu'on puisse y détecter les mêmes préoccupations de relativisation chères à l'auteur. A lire à la fois par les amateurs d'heroic-fantasy (ici bien meilleure qu'à l'ordinaire) et par ceux de Le Guin (pour comparer avec son œuvre de SF).