Né en Caroline du Sud en 1948, William Gibson vit à Vancouver et est passionné d'informatique. Voici l'intégrale de ses nouvelles, tant attendue après le succès de Neuromancien (Prix Hugo), Gravé sur chrome et Mona Lisa s'éclate, également publiés chez J'ai lu.
Turner, mercenaire, « aide » les transfuges des multinationales à déserter leur poste. Cette fois, il a pour mission de récupérer le cerveau de la biotechnologie de Mass-Neotek.
Marly, acheteuse d'art à Paris, est engagée par un milliardaire excentrique afin de retrouver l'origine de mystérieuses et fascinantes créations apparues subitement sur le marché.
Bobby, ou Comte Zéro, jeune et intrépide pirate de logiciel, opère dans les faubourgs de la Conurb. Il va se laisser entraîner par sa curiosité dans les dédales du cyberspace.
Le cyberspace, c'est l'univers artificiel des réseaux informatiques, le monde qui était déjà celui de Neuromancien. Et c'est là que leurs destins vont se croiser. Mais ils ne seront pas les seuls.
William Gibson est un auteur a succès, une découverte qu'on s'arrache, et que La Découverte Fictions publie intensivement, puisque outre ses deux romans, ils prévoient de traduire son recueil de nouvelles Burning Chrome, mettant ainsi pratiquement sur le marché les œuvres complètes de ce jeune écrivain. Le grand mérite de Gibson réside en son écriture, nourrie de heurts et de contrastes, ou les verbes arrivent en rafales dans des phrases courtes. Pourtant, il s'en dégage une poésie parfois très forte (qu'il est toujours difficile de restituer dans la traduction), même et surtout quand Gibson intègre un jargon technologique contemporain, dans une sorte d'anglais mondialisé qui colle plus à la technologie que notre propre langue.
Les premières pages de Comte Zéro sont symptomatiques tant de ces qualités que des défauts qui peuvent les accompagner : une perte de réflexion, de sentiment, due peut-être à l'ivresse de la technologie, qui menace sans cesse de faire basculer le roman dans l'exotisme et le visionnage publicitaire du futur. Comte Zéro ne met pas en jeu les idées lourdes de menace et de merveilleux de Neuromancien, pas d'intelligence artificielle prête à s'éveiller, et quand on visite le cyberspace, c'est pour y trouver les loas du Vaudou. On me pardonnera de crier au tricheur, l'économie esthétique que la SF avait emprunté à la science en prend du plomb dans l'aile.
Du coup, le livre s'épuise dans courses et combats, alors que Gibson sait faire tellement mieux (et on s'en rend compte quand on lit les nouvelles réunies dans Burning Chrome). Pour admirable qu'elle soit, l'écriture habille une coquille creuse. Si on pouvait comparer Neuromancien au roman noir, avec la même intensité dans l'amertume existentielle, Comte Zéro tombe au niveau de James Bond, riche en décors, en gadgets et en péripéties plus qu'en substance.