Dino BUZZATI Titre original : Il colombre e altri cinquanta racconti, 1966 Première parution : Italie, Milan : Arnoldo Mondadori Editore, avril 1966ISFDB Traduction de Jacqueline REMILLET Illustration de VOLVOX
POCKET
(Paris, France), coll. Littérature - Best n° 3641 Dépôt légal : mai 1997, Achevé d'imprimer : juin 1998 Retirage Recueil de nouvelles, 448 pages, catégorie / prix : 5 ISBN : 2-266-00994-X Format : 11,0 x 18,0 cm✅ Genre : Imaginaire
Lorsque le vieux Stefano rencontre enfin le K, le squale qui doit le dévorer, il découvre que le monstre l'a poursuivi sur toutes les mers du monde, non pour le dévorer, mais pour lui remettre la perle merveilleuse « qui donne à celui qui la possède fortune, puissance, amour et paix de l'âme ».
Devenu, avec "Le désert des Tartares", un classi que du XXe siècle, ce récit ouvre un recueil de 50 contes fantastiques où l'on retrouve tous les thèmes poignants et familiers de Dino Buzzati : la fuite des jours, la fatalité de notre condition de mortels, l'angoisse du néant, l'échec de toute vie, le mystère de la souffrance et du mal. Autant d'histoires merveilleuses, tristes ou inquiétantes pour traduire la réalité vécue de ce qui est par nature incommunicable.
Né en 1906 et mort à Milan en 1972, Dino Buzzati, peintre et journaliste, travaille très jeune comme correspondant de guerre pour le « Corriere della Sera ». Marqué par l'influence de Kafka, il se tourne vers la littérature. « Le désert des Tartares » (1940), sa troisième œuvre, connaît un succès immédiat et mondial. « Le K », publié en 1966, reste son recueil de nouvelles le plus universellement célèbre. Également chez Pocket : « Le désert des Tartares ».
1 - Le K (Il colombre, 1966), pages 7 à 14, nouvelle 2 - La Création (La creazione, 1966), pages 15 à 23, nouvelle 3 - La Leçon de 1980 (La lezione del 1980, 1961), pages 25 à 32, nouvelle 4 - Général inconnu (Generale ignoto, 1961), pages 33 à 38, nouvelle 5 - Le Défunt par erreur (L'erroneo fu, 1966), pages 39 à 45, nouvelle 6 - L'Humilité (L'umiltà, 1958), pages 47 à 54, nouvelle 7 - Et si ? (E se?, 1959), pages 55 à 60, nouvelle 8 - A monsieur le Directeur (Riservatissima al signor direttore, 1960), pages 61 à 70, nouvelle 9 - L'Arme secrète (L'arma segreta, 1960), pages 71 à 77, nouvelle 10 - Un amour trouble ? (Un torbido amore, 1958), pages 79 à 86, nouvelle 11 - Pauvre petit garçon ! (Povero bambino!, 1960), pages 87 à 93, nouvelle 12 - Le Casse-pieds (Il seccatore, 1960), pages 95 à 102, nouvelle 13 - Le Compte (Il conto, 1960), pages 103 à 109, nouvelle 14 - Week-end (Week-end, 1966), pages 111 à 116, nouvelle 15 - Le Secret de l'écrivain (Il segreto dello scrittore, 1958), pages 117 à 122, nouvelle 16 - Petites histoires du soir (Storielle della sera, 1964), pages 123 à 130, nouvelle 17 - Chasseurs de vieux (Cacciatori di vecchi, 1962), pages 131 à 139, nouvelle 18 - L'Œuf (L'uovo, 1962), pages 141 à 150, nouvelle 19 - Dix-huitième trou (Diciottesima buca, 1964), pages 151 à 157, nouvelle 20 - Le Veston ensorcelé (La giacca stregata, 1962), pages 159 à 166, nouvelle 21 - Le Chien vide (Il cane vuoto, 1962), pages 167 à 173, nouvelle 22 - Douce nuit (Dolce notte, 1962), pages 175 à 180, nouvelle 23 - L'Ascenseur (L'ascensore, 1962), pages 181 à 188, nouvelle 24 - Les Dépassements (I sorpassi, 1962), pages 189 à 196, nouvelle 25 - Ubiquité (L'ubiquo, 1962), pages 197 à 205, nouvelle 26 - Le Vent (Il vento, 1959), pages 207 à 213, nouvelle 27 - Teddy boys (Teddy boys, 1959), pages 215 à 221, nouvelle 28 - Le Petit ballon (Il palloncino, 1963), pages 223 à 228, nouvelle 29 - Suicide au parc (Suicidio al parco, 1963), pages 229 à 236, nouvelle 30 - La Chute du saint (Il crollo del santo, 1963), pages 237 à 243, nouvelle 31 - Esclave (Schiavo, 1963), pages 245 à 252, nouvelle 32 - La Tour Eiffel (La Torre Eiffel, 1964), pages 253 à 260, nouvelle 33 - Jeune fille qui tombe…tombe (Ragazza che precipita, 1963), pages 261 à 266, nouvelle 34 - Le Magicien (Il mago, 1966), pages 267 à 273, nouvelle 35 - La Boîte de conserves (La barattola, 1960), pages 275 à 282, nouvelle 36 - L'Autel (L'altare, 1964), pages 283 à 289, nouvelle 37 - Les Bosses dans le jardin (Le gobbe nel giardino, 1963), pages 291 à 296, nouvelle 38 - Petite Circé (Piccola Circe, 1959), pages 297 à 305, nouvelle 39 - L'Épuisement (Il logorio, 1965), pages 307 à 312, nouvelle 40 - Quiz aux travaux forcés (Quiz all'ergastolo, 1959), pages 313 à 319, nouvelle 41 - Iago (Jago, 1961), pages 321 à 329, nouvelle 42 - Progressions (Progressioni, 1966), pages 331 à 338, nouvelle 43 - Les Deux chauffeurs (I due autisti, 1963), pages 339 à 345, nouvelle 44 - Un service difficile (Un servizio difficile, 1965), pages 349 à 356, nouvelle 45 - Les Secrets du "MM" (I segreti della « MM », 1965), pages 357 à 364, nouvelle 46 - Les Diablesses (Le diavolesse, 1965), pages 365 à 373, nouvelle 47 - Les Accélérations (Le accelerazioni, 1965), pages 375 à 382, nouvelle 48 - Les Solitudes (Le solitudini, 1965), pages 383 à 390, nouvelle 49 - L'Entrümpelung (L'Entrümpelung, 1965), pages 391 à 398, nouvelle 50 - Fauve au volant (Belva al volante, 1965), pages 399 à 405, nouvelle 51 - Le Jardin (Il giardino, 1965), pages 407 à 412, nouvelle 52 - François LIVI, Postface, pages 413 à 434, postface 53 - Repères biographiques, pages 435 à 438, biographie 54 - Repères bibliographiques, pages 439 à 443, notes
Avec Le désert des tartares, beau roman aux accents kafkéens, puis avec L’écroulement de la Baliverna, Dino Buzzati s’était taillé la réputation du meilleur écrivain fantastique italien. Avec Une image de pierre, il avait effleuré, avec un peu moins de bonheur mais tout de même beaucoup de talent, la science-fiction. Je n’ai pas lu ses carnets, parus sous le titre En ce moment précis, mais la critique, pour une fois unanime sur le compte d’un ouvrage insolite, les avait salués avec transports.
Il serait trop injuste de retirer à Dino Buzzati tous ses lauriers sur la foi d’un seul livre médiocre. Car son dernier recueil de nouvelles, Le K., ne vaut pas grand-chose. On n’y retrouve ni la maîtrise glacée de l’expression, l’ironie hautaine, l’élégance subtile, ni l’originalité des idées ou des atmosphères qui faisaient sa réputation. À la place, de petits contes à la morale courte, mal fagotés, bâclés au fil de la plume en tirant et ahanant sur l’inspiration, va comme je te pousse, encore une ligne encore une page encore un texte de bouclé, qui se serrent les uns contre les autres comme s’ils avaient froid et se succèdent interminablement dans cet épais recueil avec la mine ahurie des voyageurs dans un hall de gare. Certes, il y a là une certaine patte, des joliesses, çà et là quatre répliques justes, un dialogue bien balancé, une image plaisante qui retient l’œil, bref, des riens qui chez un Inconnu ou même chez un autre susciteraient l’attention. Pas chez Dino Buzzati.
À cette baisse de forme, il y a une explication. Dino Buzzati, pour vivre, est journaliste. Il travaille au Corriere Délla Sera. À ce digne journal, il donne selon un rythme que je crois hebdomadaire de petits contes. Ce sont des années entières de cette production alimentaire, encore que sans doute plaisante quand elle est absorbée entre les rumeurs de guerre et les faits divers, qui se trouvent empilées, légèrement jaunies, dans ce recueil. C’est dommage. La gloire de Buzzati n’y a rien gagné. Je ne suis pas sûr, encore que je le lui souhaite, que sa fortune s’en trouve augmentée. Son éditeur, en tout état de cause, eût dû faire un tri sévère. Un quart de ces histoires peut-être méritaient d’échapper au pilon. Quant au reste, un oubli miséricordieux aurait pu lui être accordé.
La sortie de ce recueil a été pourtant l’occasion pour nous de découvrir un aspect inattendu du talent de Buzzati. La librairie La Pochade, boulevard Saint-Germain, qui multiplie cette année les initiatives ingénieuses et qui semble porter au fantastique, à l’insolite et à la science-fiction un intérêt particulier, a exposé trente-six toiles et dessins de Dino Buzzati. Il peint depuis quelques années, renouant avec une ancienne vocation contrariée, dans un style curieusement proche du pop-art et de la bande dessinée, au point que certaines de ses toiles sont découpées en petits rectangles et racontent une histoire. Ce n’est pas du grand art, mais c’est amusant et en même temps éclairant sur les fantasmes de l’écrivain qui édifie un univers insolite, baroque, peuplé de chats et de courtisanes, traversé de meurtres et de monstres. La drôlerie des légendes, qui s’étirent parfois jusqu’aux dimensions d’un texte court, vient souligner l’humour du peintre qui contraste avec la gravité habituelle de l’écrivain. En voici un exemple :
« Portrait du calita Mash Er Rum et de ses vingt femmes : le Prince des Croyants était si strictement végétarien que ses nombreuses femmes, pour éveiller son désir, feignaient d’être qui une carotte, qui un céleri, qui un chou-fleur et ainsi de suite ; seulement, distrait par le simulacre amoureux, de temps en temps, il les dévorait. »
Je relirai cette année Le désert des tartares et j’attendrai de l’année prochaine un nouveau, un vrai livre de Dino Buzzati.
Gérard KLEIN Première parution : 1/9/1967 Fiction 166 Mise en ligne le : 5/11/2022