POCKET
(Paris, France), coll. Le Grand Temple de la S-F n° 5074 Dépôt légal : avril 1988 Recueil de nouvelles, 384 pages, catégorie / prix : 6 ISBN : 2-266-02213-X ✅ Genre : Science-Fiction
J. G. Ballard est né en 1930 à Shanghai où il passa toute son enfance. Pendant la Deuxième Guerre mondiale, il fut interné avec ses parents dans un camp de concentration japonais ; cette terrible épreuve lui inspira Empire du soleil. Avec lui, la science-fiction opère sa révolution copernicienne, explorant non plus les espaces intersidéraux mais les espaces intérieurs. Après Hiroshima, le passé n'est plus un modèle ; on ne peut que rêver de l'avenir ; la vie, c'est le présent. Sécheresse et Le Vent de nulle part décrivent de grandioses catastrophes où un solitaire, dans la déroute universelle, part... en quête de lui-même ! Crash ! et I.G.H. se situent dans un décor artificiel de mégalopoles saturées où l'homme est en proie aux choses, où le cataclysme technologique mutile les personnages... non sans les fasciner. Les paysages oniriques de Vermilion Sands accueillent des artistes qui se livrent à la joie de créer dans le temps retrouvé du loisir. Partout le réel rencontre les fantasmes et la vocation du sujet est de vivre dans l'œil du cyclone, en communion avec les objets qui l'entourent. L'apocalypse apporte moins la peur de mourir que le vertige du nouveau.
1 - Robert LOUIT, Le Chirurgien de l'Apocalypse, pages 7 à 41, préface 2 - L'Homme subliminal (The Subliminal Man, 1963), pages 43 à 66, nouvelle, trad. Robert LOUIT 3 - L'Homme saturé (The Overloaded Man, 1961), pages 67 à 84, nouvelle, trad. Alain DORÉMIEUX 4 - Treize pour le Centaure (Thirteen to Centaurus, 1962), pages 85 à 115, nouvelle, trad. Robert LOUIT 5 - Chronopolis (Chronopolis, 1960), pages 116 à 148, nouvelle, trad. Gisèle GARSON & Pierre VERSINS 6 - Fin de partie (End-Game, 1963), pages 149 à 175, nouvelle, trad. Robert LOUIT 7 - Demain, dans un million d'années (Tomorrow Is a Million Years, 1966), pages 179 à 194, nouvelle, trad. Lionel MASSUN 8 - Le Jour de toujours (The Day of Forever, 1966), pages 195 à 217, nouvelle, trad. Robert LOUIT 9 - Un assassin très comme il faut (The Gentle Assassin, 1961), pages 218 à 237, nouvelle, trad. Guy ABADIA 10 - Le Vinci disparu (The Lost Leonardo, 1964), pages 238 à 262, nouvelle, trad. Pierre BILLON 11 - Perte de temps (Escapement, 1956), pages 263 à 280, nouvelle, trad. Bruno MARTIN 12 - Le Géant noyé (The Drowned Giant / Souvenir, 1964), pages 283 à 297, nouvelle, trad. René LATHIÈRE 13 - La Cage de sable (The Cage of Sand, 1962), pages 298 à 328, nouvelle, trad. Gisèle GARSON & Pierre VERSINS 14 - Les Statues qui chantent (The Singing Statues, 1962), pages 329 à 345, nouvelle, trad. Robert LOUIT 15 - Amour et napalm : export U.S.A. (Love and Napalm: Export U.S.A., 1968), pages 346 à 351, nouvelle, trad. François RIVIÈRE 16 - (non mentionné), Bibliographie de J.G. Ballard, pages 353 à 363, bibliographie
Oserons-nous, à propos de ce nouveau Livre d'Or, parler d'explorations de l'Espace Intérieur ?
Depuis les premiers textes publiés sous label new wave, l'expression s'est bien affadie à l'usage ! Rien de tel donc qu'une petite plongée libre dans l'œuvre de celui qui en a pratiquement inventé la notion, ou, tout au moins, l'a introduite dans la science-fiction.
Pour ce recueil, Robert Louit a préféré à l'ordre chronologique une ordonnance thématique, et la première partie, Oppressions subtiles, donne d'emblée le ton de l'ensemble. Névroses, déviations mentales et autres joyeusetés s'introduisent peu à peu dans toutes les nouvelles présentées ici, et, contre toute attente, le lecteur imprudent n'a pas l'impression d'émerger d'une plongée nauséabonde. En effet, l'imagination de Ballard dépasse très largement ce thème de base, et son talent fait de toute façon passer bien des choses.
Ajoutons que la sélection établie par Louit est tout à fait excellente, et ce malgré la ligne directrice de la série, qui impose pour chaque recueil un pourcentage maximum d'inédits — d'où certains fiascos, avec des auteurs surexploités, comme dans le récent Livre d'Or Van Vogt.
Un Livre d'Or indispensable, donc, avec en prime les introductions à chaque texte, par l'auteur, et le plaisir de retrouver certaines nouvelles dans des traductions enfin de qualité. C'est le cas des deux textes provenant de Billenium (Marabout), sabotés dans leur édition originale.
Tout aussi important semble être Le rêveur Illimité, dernier Ballard en titre qui vient, très justement, de remporter le B.S.F.A. Award du meilleur roman anglais de l'année.
Une remarque tout d'abord : l'œuvre moderne de Ballard serait-elle à ce point éloignée de la SF que l'éditeur ait préféré supprimer de la couverture l'habituel logo « Dimensions-SF » ? Il est vrai que le Livre de Poche a, lui aussi, édité (ou plutôt réédité) du Ballard, hors de la collection SF...
Ce rêveur-là pourrait bien être Ballard lui-même (qui rêve plus qu'un écrivain ?), sous les traits de James Blake, pilote amateur échoué dans la Tamise,. aux abords d'une quelconque banlieue tranquille, après « l'emprunt » d'un petit avion. Banal incident, somme toute, mais aux conséquences pour le moins inattendues.
Blake mettra un bon moment avant de comprendre la fascination, ou l'horreur, qu'il exerce sur la population de Shepperton. Pardi ! on ne ressuscite pas tous les jours, surtout sans s'en rendre compte...
Obsédé par le désir de réaliser le premier vol à propulsion humaine (Blake aurait-il lu Léonard de Vinci ?), il contamine peu à peu son entourage... Etrange folie que celle qui fera basculer tous ces gens d'une banalité quotidienne dans un merveilleux surréalisant. Et tout le monde, ou presque s'envolera dans les airs, à la suite du démiurge Ballard...
Le rêveur illimité est-il encore un roman de science-fiction ? A vrai dire, le problème ne nous semble pas être de la première importance.
[cette critique est co-signée par Pascal J. Thomas & Francis Valéry]