En ces temps de progression de la « pensée bisounours », époque d'indulgence criminelle où la moindre critique un tantinet virulente est considérée comme une agression sans objet doublée d'une manipulation de cours de récréation, comment critiquer/rendre compte d'un ratage aussi patent que ce
Galaxies NS4 (alors que le
n°3 semblait sur la bonne voie) ?
Sur le strict plan de la forme, c'est une horreur : couverture immonde ; « notes de lectures » jetées sans ordre, non séparées, qui s'enchaînent
accelerando et semblent se brouiller ; mise en page irrespectueuse des auteurs, collaborateurs et lecteurs (j'imagine le rictus du quasi-débutant Timothée Rey découvrant, à la fin de sa nouvelle, la présence des conditions de soumission des textes — la classe). La traduction (non créditée, et on comprend vite pourquoi) de l'entretien avec Ian Watson est HALLUCINANTE. Character (personnage) traduit caractère ;
Hitchiker's guide to the galaxy traduit
Le Guide de la Galaxie en auto-stop.
Original... «
Chris Beckett est un surprenant auteur surprenant de nouvelles » page 145, perle collectée sans trucage. A ce moment précis, on frôle l'arrêt cardiaque. Sans oublier les nombreux titres de films et de romans erronés, le tout concentré sur cinq pages à peine.
Sur le plan du contenu de ce numéro 4, pas grand-chose à se mettre sous la dent, les nouvelles de Timothée Rey, Nicoletta Valorani, Laurence Sunher sont inabouties, la novella d'Elisabeth Vonarburg semble bien longue pour un résultat peu convaincant (et, paradoxalement, donne surtout envie de lire davantage de nouvelles de
Joëlle Wintrebert). Quant à la nouvelle de Jetse de Vries, sans bagage scientifique bac+5, impossible de dire si elle est géniale ou juste terriblement vaine. Le texte le plus fort de la sélection est «
Snuff Movie » de Nicoletta Valorani ; malheureusement il ne décolle jamais et s'éteint au lieu d'exploser (ceux qui lisent
Chuck Palahniuk, J.T Leroy ou
Paolo Bacigalupi auront l'impression d'avoir déjà lu ça mille fois).
Surnagent toutefois deux trois bricoles : l'entretien avec Elisabeth Vonarburg, une interview de Megan Lindholm réalisée par Anthony Vallat, un long papier de Sam Lermite sur
Vélum de
Hal Duncan, un bon papier de
Claude Ecken sur
Le Glamour de
Christopher Priest, une note de lecture fort bien vue (mais trop courte) de
Jean-Christophe Hoël sur
En Panne sèche d'
Andreas Eschbach.
Franchement, les gars, comment voulez-vous être pris au sérieux en laissant
Le Guide de la galaxie en auto-stop dans votre publication ? Ou alors vous venez d'un univers parallèle où c'est vraiment le titre du roman de
Douglas Adams... auquel cas respect.
NS4 : une grenouille anorexique qui se prend pour un bœuf de concours, à réserver aux fans
hardcore d'Elisabeth Vonarburg — qu'on souhaite sans antécédents familiaux de rupture d'anévrisme et dotés d'un cœur solide.
Maintenant vous pouvez tendre l'oreille, chers lecteurs de
Bifrost : on va bientôt entendre couiner les bisounours...