Dans ce deuxième opus du cycle de Ténébreuse, nous entrons dans le vif du sujet. L'épisode se déroule pendant la période des « âges du chaos », qui correspond à l'époque médiévale de Ténébreuse. Les parallèles avec notre Moyen Age occidental sont nombreux. On y trouve des seigneurs, installés dans des châteaux forts. Ils se querellent, se marient entre eux, se constituent de grands fiefs comme Aldaran (lieu principal de l'intrigue) et fondent des familles importantes, comme Hastur (la famille royale), Serrais, Ardais, Aillard, Elhalyn et Alton. La planète ne connaît pas encore la paix et la stabilité politique qui marque les autres volumes.
Les pouvoirs psi sont très prégnants. Le fameux « laran » joue un rôle central dans les jeux de pouvoirs, mais aussi dans la vie quotidienne et dans les conflits, où il trouve de nombreuses applications. Ces talents sont cultivés avec soin au sein de la caste dirigeante des comyns, avec un véritable programme de sélection génétique qui organise les mariages en vue de préserver, développer ou stabiliser des larans particuliers. Les télépathes les plus doués sont regroupés dans des « tours » où ils se livrent aux recherches, et surtout aux tâches industrielles, facilitées par leurs pouvoirs. Ils pratiquent l'extraction de minerais et fabriquent des armes de plus en plus meurtrières.
Deux personnages sont au cœur de l'intrigue. Dorylis d'Aldaran est la fille naturelle (nedesto) du seigneur d'Aldaran, dont elle est la seule héritière. Elle a hérité de sa mère, morte en la mettant au monde, le laran qui permet de contrôler, voire de provoquer les orages. En grandissant, son pouvoir croît à tel point qu'elle est surnommée la reine des orages, foudroyant littéralement, parfois sans même le vouloir, ceux qui tentent de l'attaquer. De son côté, le jeune Allart Hastur d'Elhalyn est lui aussi victime de son propre laran, qui lui permet de voir tous les futurs possibles engendrés par chacune de ses actions. Cela l'amène au bord de la folie, car même devant les actes les plus banals, il est paralysé par la peur des conséquences, incapable qu'il est de distinguer les futurs probables des virtualités incertaines. Réfugié au monastère de Névarsin, il doit le quitter pour revenir dans le domaine familial par nécessité politique. Son père veut en effet le marier à une jeune héritière, pour renforcer les alliances de la famille, et respecter le programme génétique.
Reine des orages offre un tableau intéressant du fonctionnement de la haute société de Ténébreuse où la politique est omniprésente. C'est aussi là que les pouvoirs psy sont les plus présents et les plus déterminants dans le déroulement de l'intrigue. L'atmosphère y est très « fantasy », le laran servant un peu à tout et n'importe quoi, du guidage des planeurs à la création d'armes de guerres en passant par la construction de châteaux. Par contre, l'intrigue et la psychologie des personnages ne se distinguent pas par une grande originalité. Reine des orages est parfois bavard, avec quelques lenteurs autour des états d'âme prévisibles de héros très stéréotypés et assez manichéens.
On peut également regretter, pour la cohérence globale du cycle, l'absence d'un tome intermédiaire, qui fasse la liaison entre la Planète aux vents de folie et Reine des orages. On se trouve brusquement plongé dans l'adolescence de Ténébreuse sans avoir rien vu de son enfance. Les origines sont déjà des mythes, avec des personnages légendaires comme Hastur et Cassilda. Ce hiatus brutal peut désarçonner un lecteur qui lit ces deux romans d'affilée.