DENOËL
(Paris, France), coll. Présence du futur n° 459 Dépôt légal : mars 1988 Première édition Roman, 320 pages, catégorie / prix : 10 ISBN : 2-207-30459-0 Format : 11,0 x 18,0 cm Genre : Science-Fiction
Quatrième de couverture
À son réveil dans un hôpital du Kluster d'Eros, Rebelle découvre plusieurs choses dérangeantes.
Primo, qu'elle était morte.
Secundo, qu'elle n'a plus le même corps.
Tertio, que ce corps est la propriété de la Deutsche Nakasone Gmbh.
Quarto, que les souvenirs d'une personnalité antérieure reviennent la hanter : ceux d'Eucrasia, cométaire, fille de sorcière, as du flugiciel, devenue pique-rôle par dépit. Et quand en plus Rebelle/Eucrasia tombe amoureuse d'un baroudeur qu'elle contribua naguère à doter de quatre (oui, quatre) personnalités indépendantes, elle sent que son odyssée ne fait que commencer. Une odyssée qui, de navette en colonie spatiale, du nuage d'Oort à la ceinture d'astéroïdes, des satellites de Mars aux cités circumlunaires, la mènera jusqu'à une Terre étrangère, devenue ruche consciente.
L'auteur
Frère spirituel de John Varley et de William Gibson, Michael Swanwick a vu, depuis 1980, plusieurs de ses nouvelles citées pour les prix Hugo et Nebula. Les Fleurs du vide est son second roman après Le baiser du masque, également paru dans la présente collection.
Critiques
Après un article-manifeste sur les cyberpunks, paru il y a deux ans aux USA, Swanwick nous offre un roman dans le genre : habitants de l'espace et informatisation de l'être humain à l'ordre du jour. Comme chez Sterling ou Walter Jon Williams, le futur vit au rythme d'un capitalisme débridé ; la vente en bloc d'une station spatiale, avec ses bidonvilles (littéralement ici) et leurs habitants est la plus belle idée du roman, comme une image d'Epinal marxiste transférée dans la ceinture des astéroïdes.
Il manquait au courant cyberpunk un héros qui exprime dans son essence même l'artificialité célébrée par le « mouvement » : c'est chose faite avec Rebelle Elizabeth Gavroche. Elle commence sa vie comme une personnalité programmée, dérobée par piratage à un conglomérat multinational. Paradoxalement, cette héroïne-là se refuse aux reprogrammations mentales qui sont l'idée et l'outil dramatique fondamental du cyberpunk : « Pas envie qu'on vienne me tripatouiller l'esprit » (p. 111). On décèle la même tendance dans les œuvres récentes de Sterling (La schismatrice), Walter Jon Williams (Câblé) ou Geo Alec Effinger (When gravity fails) : sur fond d'une société toute d'artificialité technologique, le protagoniste présente un point de vue farouchement protecteur de l'intégrité de la personne humaine. Les cyberpunks, des écolos qui s'ignorent ! En fin de compte, la Rebelle rentrera chez elle, même s'il n'est guère de jardin à cultiver parmi les astéroïdes.
Swanwick donne libre cours à son penchant pour les sous-cultures pittoresques (rappelez vous la Foire aux Mutagènes du Baiser du Masque), et louche vers Dick quand il explore les personnalités artificielles, mais Les fleurs du vide s'épuise en courses-poursuites. Si le roman est bien maîtrisé, mieux intégré que La schismatrice, il est moins fertile en concepts nouveaux. Quand on gratte un peu leur vernis de roman d'espionnage, ces livres présentent une grande similitude avec la série des Huit Mondes de Varley. Ce sont des univers que j'aime beaucoup, même si je ne pense pas que Swanwick ait ici dépassé Le canal Ophite.