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La Citadelle de l'autarque

Gene WOLFE

Titre original : The Citadel of the Autarch, 1982   ISFDB
Cycle : Le Livre du Nouveau Soleil / le Livre du Second Soleil de Teur  vol. 4 

Traduction de William Olivier DESMOND
Illustration de Daniel FURON

DENOËL (Paris, France), coll. Présence du futur précédent dans la collection n° 375 suivant dans la collection
Dépôt légal : mars 1987
Roman, 384 pages, catégorie / prix : 8
ISBN : 2-207-30375-6
Format : 11,0 x 18,0 cm
Genre : Science-Fiction

Autres éditions
   DENOËL, 1984
   in L'Ombre du bourreau - 2, 2006
   GALLIMARD, 2010

Ressources externes sur cette œuvre : quarante-deux.org

Quatrième de couverture
     Sur cette Terre si ancienne que des millions d'années d'histoire humaine l'ont imprégnée au point d'en faire un gigantesque Mémorial, plane un soleil agonisant. Mais Severian le Bourreau, lui aussi mémoire de son peuple, à la fois fabuleusement ancien et rayonnant de jeunesse, parvient à la fin du périple qui verra peut-être l'avénement d'un nouveau soleil.
     La publication de ce quatrième volume permet enfin de lire cette fresque radieuse comme son auteur le souhaite : d'un seul trait. Et de dire, pour reprendre les termes d'un célèbre critique du Washington Post : voici un livre plus grand que la somme de ses quatre parties.
 
L'auteur :
Gene Wolfe est né à New York en 1931.
Son premier texte de S.-F. paraît en 1967 et il obtient, en 1973, le Nebula de la meilleure Novella pour Mort du Dr Ile (Ed. Seghers).
Auteur d'une centaine de nouvelles et d'un remarquable roman, La Cinquième Tête de Cerbère (Ed. Laffont), Gene Wolfe s'affirme comme l'un des plus talentueux écrivains de science-fiction.
Critiques des autres éditions ou de la série
Edition DENOËL, Présence du futur (1984)

     L'intérêt de Wolfe pour Proust n'est plus un secret pour ceux qui ont lu Le souvenir à venir(paru dans Le Livre d'Or d'Orbitchez Presses Pocket), et cet intérêt éclaire d'un jour nouveau l'ensemble du Livre du Nouveau Soleil,qui s'achève avec ce quatrième volet. La mémoire totale attribuée à Séverian permet en effet de prolonger « techniquement » le principe de réminiscence qui conférait à l'œuvre de Proust cette structure semée de points de rebroussement et de cycles locaux qui en faisait une entreprise unique en son genre. Je ne crains pas d'affirmer que la « tétralogie » de Wolfe est d'une importance au moins aussi grande que A la recherche du temps perduet se situe dans le même champ littéraire. L'étiquette que l'on ne manquera pas de coller sur l'œuvre est, à la lettre, inessentielle, car le « thème » n'en est rien moins que le discours lui-même. La problématique de la mémoire ouvre ici sur une interrogation que l'on peut retrouver à tous les moments du livre : quelle est la structure globale et ponctuelle de la pensée discursive ? L'instant où cette question se pose sans doute de la façon la plus flagrante est celui où apparaît l'homme « fidèle au groupe des Dix-sept », qui ne peut s'exprimer qu'à l'aide d'aphorismes tout faits ; l'effrayante rigidité de cette contrainte n'empêche toutefois ni la communication ni la création. Bizarrement, l'histoire qu'invente l'Ascien est bien (comme Séverian le note lui-même) la plus émouvante de celles qui composent La citadelle de l'Autarque.Sans doute parce que l'évidence de sa structure obligatoire souligne la précarité du locuteur et de ce qu'il exprime.
     Et c'est bien ainsi que fonctionne Le Livre du Nouveau Soleiltout entier : étourdissant jeu sur les formes littéraires, sur les conventions grammaticales (ce n'est pas un hasard si la langue de Wolfe est si pure), le roman du Bourreau insiste sur la relativité et la fragilité de son personnage. Si Séverian semble à ce point humain, c'est qu'il est plus que tout autre inscrit dans un réseau de conventions auxquelles il ne peut échapper. Ces conventions sont de plusieurs ordres : il y a celles de sa Guilde, celles de l'Histoire, celles (variables) des lieux qu'il traverse, celles de l'organisation politique de leur. Mais il y a encore celles du codage des termes (souligné par les quatre appendices), celles d'un univers dont la majeure partie « déborde » du roman et en constitue comme le cadre, celles de la cellule orale et écrite dont Séverian est en quelque sorte le dépositaire (ne transporte-t-il pas en permanence un recueil de légendes qu'il fait découvrir à ses interlocuteurs ?), celles de l'écriture auxquelles il est contraint de se plier pour livrer sa mémoire. Celles, enfin, de la science-fiction en particulier et de la fiction en général, qui pèsent sur Wolfe l'écrivain (la forme de la trilogie en quatre volumes (+ un « faux » à tirage limité) peut être considérée comme une plaisanterie à l'usage des éditeurs et des milieux littéraires).
     Toutefois, comme l'histoire inventée par l'Ascien pour gagner sa belle, Le Livre du Nouveau Soleilréussit à séduire son public tout en désignant avec une acuité prodigieuse les lois qui le façonnent. Le discours critique qui précède, et que certains jugeront peut-être académique, n'est possible (pour moi) que parce qu'il n'est pas réducteur. Il s'agit d'une dimension effective de l'œuvre de Wolfe, dimension explicite pour qui veut bien s'y arrêter, mais qui ne pèse pas sur la lecture : le récit semble au contraire voler avec grâce et légèreté parce que le territoire au-dessus duquel il plane est défini très précisément. Wolfe prouve que l'exercice infatigable de l'intelligence et de la lucidité sont désormais la condition sine qua non de l'élaboration d'une fiction réussie et passionnante.
     Il resterait beaucoup à dire sur Le livre du Nouveau Soleil. Sa richesse exceptionnelle en fait l'un de ces livres majeurs qui étourdissent les commentateurs. Chacun des codes que je désignais plus haut est disséqué par Wolfe d'une manière très complexe et souvent paradoxale. Celui de la Loi, par exemple (au sens coutumier du terme « Loi ») : on a pu s'étonner, voire s'indigner, de l'apparent côté sympathique du Bourreau, qui « exécute » ses victimes et les sentences avec un sens consommé du travail bien fait. Mais cette caractéristique est l'illustration d'un problème philosophique classique dont le lecteur attentif peut retrouver les termes en divers lieux du récit ; alors, faut-il « tuer les porteurs de mauvaises nouvelles » ? Si les critiques parlent de relations ponctuelles là où Wolfe travaille sur les combinatoires, le quiproquo paraît inévitable. Gare ! On va vous parler d'heroïc-fantasy ou de fiction spéculative. A moins que l'on ne vous raconte l'histoire — mais laquelle ? La citadelle de l'Autarque est une mosaïque d'histoires. Leur point commun ? Elles font la mémoire de Séverian, bien sûr... Et gageons qu'elles façonneront aussi la mémoire des lecteurs de SF.

Emmanuel JOUANNE
Première parution : 1/7/1984
dans Fiction 353
Mise en ligne le : 1/6/2006

Prix obtenus
John W. Campbell, Jr. Memorial, [sans catégorie], 1984
Apollo, [sans catégorie], 1985


Cité dans les Conseils de lecture / Bibliothèque idéale des oeuvres suivantes
Stan Barets : Le Science-Fictionnaire - 2 (liste parue en 1994)  pour la série : Le Livre du Nouveau Soleil / le Livre du Second Soleil de Teur
Jean-Bernard Oms : Top 100 Carnage Mondain (liste parue en 1989)  pour la série : Le Livre du Nouveau Soleil / le Livre du Second Soleil de Teur
Association Infini : Infini (2 - liste secondaire) (liste parue en 1998)  pour la série : Le Livre du Nouveau Soleil / le Livre du Second Soleil de Teur

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