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Plus noir que vous ne pensez

Jack WILLIAMSON

Titre original : Darker Than You Think, 1948
Première parution : Reading, USA : Fantasy Press, 1948
Traduction de Michel CHRESTIEN
Illustration de Wojtek SIUDMAK

POCKET (Paris, France), coll. Science-Fiction / Fantasy n° 5017
Dépôt légal : 1er trimestre 1978, Achevé d'imprimer : 2 janvier 1978
Réédition
Roman, 288 pages, catégorie / prix : 3
ISBN : 2-266-00489-1
Format : 10,9 x 17,9 cm
Genre : Fantastique



Quatrième de couverture
Une angoisse mortelle gagna l'auditoire du professeur Mondrick lorsqu'il déclara d'une voix haletante  : « Je vais vous parler d'un ennemi masqué, d'un clan secret qui conspire, au milieu des hommes vrais... Je vais vous parler de la venue prochaine d'un Messie noir, l'enfant de la nuit, dont l'apparition au milieu des hommes vrais sera le signal d'une révolte sauvage et sanglante... Sans doute ces chasseurs de la nuit savent-ils aujourd'hui que nous les avons démasqués... Je vous demande de m'écouter... Car je crois qu'en répandant la vérité il reste encore une chance de défaire ces membres secrets du Clan... J'espère encore que...  »
Mondrick s'étrangla. Ses mains montèrent à sa gorge. Son visage torturé devint livide. Quelqu'un appela une ambulance mais il avait cessé de vivre.
 
Jack WILLIAMSON, né en 1908, appartient à la génération des « Grands de l'Age d'Or  » — Van Vogt, Heinlein, Asimov. Son œuvre, caractérisée par une grande diversité d'inspiration, illustre les principaux thèmes de la science-fiction  : l'utopie révolutionnaire , avec Birth of a new Republic 1931, l'heroïc fantasy avec The golden blood, l'aventure galactique (la Légion de l'espace, le Cométaire), la biologie fantastique (Plus noir que vous ne pensez). Il a donné récemment trois récits en collaboration avec Frédéric Pohl  : les Récifs de l'espace (1963), l'Enfant des étoiles (1965), Rogue star (1968).
Critiques des autres éditions ou de la série
Edition Joëlle LOSFELD, Arcanes (2004)

     Si l'écrivain américain Jack Williamson (né en 1908) souffre aujourd'hui en France d'un grave déficit de notoriété, rappelons qu'il s'est rendu célèbre en son temps pour sa série de space opera de La Légion de l'espace. Il s'est aussi essayé à la Fantasy (Sang doré), au thriller futuriste (Les humanoïdes) et au fantastique, avec Plus noir que vous ne pensez (1940) aujourd'hui réédité par les éditions Joëlle Losfeld. D'aucuns considèrent ces deux derniers romans comme les meilleurs de Williamson. Il est vrai que ses récits des années trente, bien que fort sympathiques, étaient surtout faits de bric et de broc et ne s'embarrassaient pas d'un style digne de ce nom — sauf si une armada d'adjectifs et d'adverbes édifiants (le mot « terrifiant » placé deux fois par page, par exemple) est considérée comme un style à part entière... Plus noir que vous ne pensez n'échappe pas entièrement à la règle, mais fait preuve d'un effort stylistique patent. Allons voir de plus près. Un journaliste alcoolique, Will Barbee, enquête sur la mort inexpliquée du professeur Mondrick — terrassé en plein discours avant d'avoir pu dévoiler au monde entier sa terrible découverte. Will Barbee se transforme-t-il vraiment en animal sauvage, la nuit, comme le prétend la très attirante April Bell, ou est-il seulement victime de son inconscient, comme le suggère le très pragmatique Dr Archer Glenn ? Barbee, luttant contre ses démons intérieurs, est confronté à une opération eugénique sans précédent dont l'enjeu n'est autre, évidemment, que l'avenir de l'humanité.

     Plus noir que vous ne pensez s'apparente bien sûr au fantastique, mais aussi au roman noir : le journaliste désabusé et porté sur la bouteille, la femme fatale de service, les manipulations, les complots, etc., l'inscrivent en effet dans la plus pure tradition du genre. Mais la nature très particulière du héros — que nous ne révélerons pas ici — permet d'établir un suspense inédit. L'enjeu de la lutte intérieure de Barbee n'est en effet rien de moins qu'une guerre larvée opposant les humains proprement dits et les descendants d'une race aux pouvoirs effrayants, jadis exterminée par l'Inquisition (mais qui subsiste encore sous forme de gènes isolés au cœur de notre patrimoine génétique). Inutile de vous dire que le thème du loup-garou prend lui aussi une autre dimension !

     Car non seulement Williamson nous révèle l'origine de la plupart de nos mythes, mais il tente de surcroît de leur conférer une assise scientifique 1 : les phénomènes de lycanthropie (ou ses équivalents) seraient liés à une maîtrise instinctive des probabilités par certains individus porteurs des gènes cités plus haut. En effet, dans l'absolu, les particules constituant tel ou tel être vivant sont les mêmes ; seul leur agencement diffère. Les sorciers, les loups-garous, auraient donc le pouvoir de forcer les probabilités et d'adopter la forme désirée (et même à passer à travers les murs). Cette idée apparemment farfelue préfigure en fait les spéculations d'auteurs modernes comme Greg Egan, qui dans Isolation invente l'étalement et la réduction, c'est-à-dire le choix d'une réalité parmi les possibles, et la destruction instantanée de toutes les autres (idée d'ailleurs déjà développée par Williamson dans le plaisant Legion of time 2 en 1938).

     Avec ce roman hybride, Williamson aurait donc pu devenir l'égal d'un Matheson ou d'un Lovecraft, mais une fâcheuse tendance à la facilité et aux métaphores sexuelles risibles (Barbee-le-serpent-géant glissant sur le corps nu de la belle April ; les cuisses nues de la belle April enserrant le corps musclé de Barbee-le-loup-gris...) ne favorise certes pas sa consécration... Il n'est toutefois pas exclu, comme le suggérait Jean-Pierre Andrevon (in Le Monde de la Science-fiction, M.A. éditions), que ce roman soit en fait humoristique 3. La place prépondérante de la psychanalyse freudienne (dont l'auteur vante les mérites et dénonce les limites) n'exclut pas en effet que ces pitoyables métaphores sexuelles puissent n'être qu'une mauvais blague à l'intention des adorateurs de Sigmund. D'accord, c'est tiré par les cheveux. N'empêche : Plus noir que vous ne pensez est vraiment un excellent bouquin.

Notes :

1. Et voilà pourquoi, comme dans le cas des romans de Matheson Je suis une légende et L'Homme qui rétrécit, des ouvrages aux ressorts fantastiques peuvent néanmoins se rattacher à la SF.
2. Legion of Time dont il existe enfin une traduction (Les guerriers du temps, éd. P. Granet, 2004, trad. Y. Bourg, 118 pages, 29,90 €) disponible sur demande à l'adresse Patrice.GRANET@sncf.fr
3. Voir en ligne cet article de J.-P. Andrevon sur J. Williamson [note de nooSFere]

Olivier NOËL
Première parution : 1/6/2004
dans Galaxies 33
Mise en ligne le : 22/12/2008

Cité dans les Conseils de lecture / Bibliothèque idéale des oeuvres suivantes
Annick Béguin : Les 100 principaux titres de la science-fiction (liste parue en 1981)
Jacques Sadoul : Anthologie de la littérature de science-fiction (liste parue en 1981)
Jean-Bernard Oms : Top 100 Carnage Mondain (liste parue en 1989)
Lorris Murail : Les Maîtres de la science-fiction (liste parue en 1993)
Stan Barets : Le Science-Fictionnaire - 2 (liste parue en 1994)
Association Infini : Infini (1 - liste primaire) (liste parue en 1998)
Jean-Pierre Fontana : Sondage Fontana - Fantastique (liste parue en 2002)

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