Autres éditions in L'Île du Docteur Moreau suivi de La Machine à explorer le temps, ARCHIPOCHE, 2017 in La Machine à explorer le temps suivi de six récits, EDITO-SERVICE, 1968 GALLIMARD, (date inconnue) in La Machine à explorer le temps suivi de L'île du docteur Moreau, 1975 in La Machine à explorer le temps suivi de L'île du docteur Moreau, 1977 in La Machine à explorer le temps suivi de L'île du docteur Moreau, 1981 in La Machine à explorer le temps suivi de L'île du docteur Moreau, 1982 in La Machine à explorer le temps suivi de L'île du docteur Moreau, 1990 in La Machine à explorer le temps suivi de L'île du docteur Moreau, 1991 GALLIMARD, 1992 in La Machine à explorer le temps suivi de L'île du docteur Moreau, 1994 in La Machine à explorer le temps suivi de L'île du docteur Moreau, 1997 GALLIMARD, 2001, 2004, 2009, 2016, 2019 GALLIMARD Jeunesse, 1972, 1976, 1977, 1982, 1987, 1989, 1990, 1990, 1990, 1997, 1998, 2002, 2003 in Au vingt-neuvième siècle et autres récits d'anticipation, LIBRIO, 2018 in La Machine à explorer le temps suivi de L'île du docteur Moreau, LIVRE DE POCHE, 1965 in La Machine à explorer le temps suivi de L'île du docteur Moreau, 1966 in La Machine à explorer le temps suivi de L'île du docteur Moreau, 1968 in La Machine à explorer le temps suivi de L'île du docteur Moreau, 1969 in La Machine à explorer le temps suivi de L'île du docteur Moreau, 1971 MERCURE DE FRANCE, 1941 in Œuvres, 1963 in Récits d'anticipation, 1988 in Les Chefs-d'oeuvre de H.G. Wells, OMNIBUS, 2007 RBA, 2021 René KIEFFER, 1927 ROMBALDI, 1973, 1975 in L'Île du Dr. Moreau, suivi de La Machine à explorer le temps, TALLANDIER, 1978
Cet ouvrage est un classique surgi du XIXe siècle, puisqu'il a été publié en 1895. Et il demeure non seulement lisible mais passionnant à cause de l'entrecroisement des thèmes qu'il présente. Ces thèmes, la science-fiction va les exploiter et leur faire produire du neuf jusqu'à nos jours.
Avant Wells, on avait déjà voyagé dans le futur : Louis Sébastien Mercier par exemple, qui écrit L'An 2440 en 1740, ou Edward Bellamy avec son Looking Backward (2000-1887) en 1888. Mais dans ces deux cas, il s'agit d'une sorte de voyage onirique, comme encore en 1890 avec News from Nowhere de William Morris. L'originalité de Wells est double, pour ce qui regarde le voyage. D'une part, il utilise une machine — qui ressemble furieusement à la bicyclette que l'on venait de mettre à la mode. D'autre part, il donne une explication pour justifier la possibilité théorique du voyage, ce qui ne sera plus nécessaire par la suite, les auteurs de SF considérant cette démonstration comme un acquis. Mais Wells ne s'en tient pas là. Ce voyage et ce voyageur doivent servir à illustrer une idée. D'où les souvenirs que le narrateur héros rapporte de son exploration du futur : des fleurs inconnues, des images de fin de monde semblables à celles de Camille Flammarion, et un portrait de la société anglaise du futur.
Pour saisir l'originalité de ce portrait, il faut se souvenir que la théorie de l'évolution promue par Darwin ne date alors que d'à peu près quarante ans, et qu'elle est encore mal reçue. L'Homme, perçu jusqu'alors comme créature divine et image même de Dieu, en prend un coup. De plus, ces années-là voient l'émergence des idées socialistes et des syndicats ouvriers qui demandent de ne plus être considérés comme des bêtes : pensons en France à Germinal (1885).
Le voyageur temporel va découvrir ce qu'est devenue dans le futur le résultat de la séparation des deux classes sociales de l'Angleterre de 1895. Comme elles se reproduisent par endogamie, elles deviennent deux races différentes. Les anciens possédants, inutiles et improductifs, ont évolué en d'adorables poupées infantiles : ce sont des végétariens qui vivent au soleil où les légumes et les fruits les nourrissent. La race des ouvriers s'est enfouie sous terre, d'où ils animent des machineries qui rendent possible l'existence des anciens maîtres dont fait partie Weena, gracieuse femme-enfant que le narrateur sauve de la noyade. Mais les ex-ouvriers, qui ne supportent plus la lumière du soleil ou celle du feu, devenus la race des Morlocks, ne dédaignent pas la chair fraîche et malheur aux hommes infantiles et aux femmes-fleurs qui ne se protégeraient pas pendant la nuit. Au centre du récit, la statue allégorique d'un sphinx, et un musée.
Outre les qualités d'imagination qui aujourd'hui semblent naïves mais ont fait leur effet, on peut voir à l'œuvre, à la différence des livres de Jules Verne, une dimension nouvelle des textes d'anticipation de cette fin de siècle. Avec Wells, une vision critique du présent, une sorte d'avertissement peut se faire jour, sans didactisme, à base d'images choc. Après avoir conté ses aventures dans le futur, le voyageur disparaît lors d'un nouveau voyage vers le passé...
Un ouvrage à lire ou à relire, tout comme La Guerre des mondes et L'Île du docteur Moreau, que les films ont en général massacrés.