LES ENQUÊTES DE LOGICIELLE

     Christian GRENIER a choisi des ingrédients qui intéressent les adolescents d'aujourd'hui — informatique, virtuel, ordinateurs, Internet et jeux de rôles — pour cinq enquêtes de Logicielle. Musique, théâtre, pêche à la mouche, tourisme en Périgord ou gastronomie, feront sans doute l'unanimité des prescripteurs qui estiment qu'il est toujours bon de découvrir quelque chose, mais seront peut-être des thèmes moins prisés par les adolescents.

     Autre chose : dans LES ENQUÊTES DE LOGICIELLE, nous avons une double figure paternelle, Germain-Germain et Delumeau, une double figure filiale, Logicielle et Max, mais il y a absence de figure maternelle. Les personnages féminins, autres que Logicielle, sont à peine esquissés, ont des rôles assez secondaires et n'ont en aucun cas une ampleur correspondant à celle d'un Germain-Germain ou d'un Delumeau. Il manque à Logicielle une mère de substitution pour son total équilibre.

     Malgré ces constatations de détail, j'aimerais rencontrer, un adolescent qui, comme Frank, interviewé à propos de la lecture dans L'Enfant lecteur. Tout pour faire aimer les livres, répond : « Je n'aime pas lire, ça ressemble à l'école. Je n'ai pas le courage de lire et puis je suis trop occupé. Il y a des livres qui ont trop d'écritures.  » Je commencerais à lui lire le début d'une nouvelle, afin qu'il n'y ait pas trop d'écritures, disons le début de Minuit en rouge et noir, et je suis prête à parier qu'il voudra lire la suite et que, par le biais des quatre nouvelles mettant en scène Logicielle, il pourra être amené à lire un roman complet, en commençant par L'Ordinatueur ou Simulator. En effet, les enquêtes ne nécessitent pas d'être lues dans l'ordre de parution, car Christian GRENIER prend toujours soin de faire les rappels nécessaires à la compréhension des liens entre les personnages.

     Si les héros des enquêtes de Logicielle sont aussi vivants, c'est aussi parce que Christian GRENIER utilise de nombreux éléments de sa vie personnelle. Je me cantonnerai à l'aspect matériel de sa vie et me garderai de faire un amalgame avec les traits de caractère des uns ou des autres... Comme Logicielle, Christian GRENIER a vécu à Epinay sur Seine, comme Max, il est adepte de la science-fiction et se déplaçait à moto dans Paris. Comme Germain-Germain, il est tombé amoureux du Périgord et de ses spécialités. Comme le commissaire, il vit dans une grande maison carrée flanquée de deux pigeonniers. Comme Logicielle, Sophie, la fille de Christian GRENIER, prend le T.G.V. pour rendre visite à son père au Fleix et ce dernier va l'accueillir en gare de Libourne. Comme Logicielle, Sophie avait vingt cinq ans au moment de l'écriture de Coups de théâtre. Les liens sont très forts entre le créateur et ses personnages. Le lecteur le ressent.

     Ce ne sont pas des super héros et ils ne sont pas tout à fait « politiquement corrects » : ils ont des défauts et vont, paradoxalement, dans le cadre de leurs enquêtes, jusqu'à enfreindre la loi. Ils en sont d'autant plus sympathiques et il est d'autant plus facile, pour un adolescent, de s'identifier à eux.

     J'ai découvert le personnage de Logicielle, en tant qu'adulte prescripteur, il m'a plu ; j'ai découvert qu'elle était l'héroïne d'une série policière pleine d'humour, LES ENQUÊTES DE LOGICIELLE, série très recherchée au salon de Creil. Or il se trouve qu'actuellement, les séries sortent beaucoup en bibliothèque. Je lis dans le magazine Page de septembre 2005, consacré aux Personnes et personnages dans la littérature de jeunesse : « L'engouement pour les séries est réel et les retrouvailles avec un héros auquel on s'est attaché, permettent de véritablement déclencher le plaisir de lire chez certains enfants. »

     En bibliothèque je proposerai ces livres en tant que série policière, aux mordus de romans, comme Laetitia qui déclare, dans l'Enfant lecteur : « Quand je lis un livre, des fois, c'est comme si je ne pouvais plus m'arrêter. Bon, quand il y a un point, je m'arrête. Puis, après, je peux repartir tant que je veux. Quand je lis un livre, je lis le livre tout entier.  » Je tenterai de faire, à haute voix, une lecture amorce des cinq nouvelles pour mettre en appétit les adolescents rétifs à la lecture de romans.